L’intérêt de l’immatriculation
Elle
est pour le preneur, la clef lui permettant de soumettre son bail au bénéfice
du statut des baux commerciaux.
Dès
lors, le renouvellement du bail, pierre angulaire de l’édifice statutaire, est
soumis à cette immatriculation, qu’il soit demandé ou offert (même plusieurs
années à l’avance)[1].
Mais
d’une manière générale, le locataire doit être immatriculé, dès lors qu’il
sollicite l’application du statut et pas exclusivement le renouvellement de son
bail[2].
Qui doit être immatriculé ?
-
Le locataire commerçant ;
-
L’indivisaire qui exploite le
fonds ;
-
Les époux coexploitants ;
-
Le nu-propriétaire même
non-exploitant[3] ;
-
L’héritier d’un locataire qui
n’avait pas l’obligation de s’immatriculer ;
-
L’exploitant d’un
établissement secondaire[4]
même si son établissement principal est immatriculé. Attention
cependant à ce qu’un local accessoire (qui n’est pas un établissement
secondaire et comme tel n’a pas à être immatriculé) ne devienne pas « en
cours de route » un établissement secondaire (en venant à recevoir de la
clientèle) (cf. Traité des baux commerciaux de M. J-P Blatter Ed. le Moniteur).
Le locataire doit-il être immatriculé à tout moment ?
Non.
Il se déduit de l’exigence l’égale et jurisprudentielle que c’est donc à la date
où demande de renouvellement[5]
et congé avec offre de renouvellement sont régularisés que l’immatriculation
est fondamentale[6].
Par
ailleurs, durant le temps où le fonds est le cas échéant en location-gérance,
le l’unique locataire principal, ou les membres de l’indivision locataire
principale, n’ont pas à s’immatriculer pour bénéficier du droit au
renouvellement (Code. Com. L.145-1 II.).
Attention donc pour le ou les locataire(s), à ne pas faire cesser la
location gérance, sans que le locataire principal ou l’un des membres de
l’indivision ne s’immatricule au jour de la cessation de la location-gérance et
exploite les lieux effectivement, ou bien sans que le ou les héritiers
ai(en)t demandé, le maintien de l’immatriculation du de cujus (L.145-1
III § 2).
En
cas de copreneurs ou de locataires indivis, seul doit être immatriculé,
l’exploitant du fonds, les autres n’ont pas à l’être (L.
145-1 III § 1er.), sauf en cas de
démembrement entre un usufruitier et un nu-propriétaire : même si le
nu-propriétaire n’exploite pas le fonds, il doit être immatriculé sous la
dénomination propriétaire non exploitant (cf. supra).
Dans
l’hypothèse visée par l’article L. 145-1 III § 2, savoir le maintien de
l’immatriculation du prédécédé, il convient de se reporter en pratique à
l’article R. 123-46 du code de commerce qui prévoit que le décès de la personne
immatriculée doit faire l’objet d’une déclaration rectificative du RCS
« avec possibilité de déclarer le maintien provisoire, pendant un délai
maximum d’un an, de l’immatriculation. »
Quelques
cas où l’absence d’immatriculation est admise par la jurisprudence
Le
cédant d’un fonds peut ne pas être immatriculé au moment de la cession, ce que
le bailleur ne peut lui reprocher[7]
Le
bail est expiré, le locataire se fait radier et se maintient dans les lieux en
attendant la fixation en justice de l’indemnité d’éviction…le bailleur ne peut
lui opposer la déchéance du droit à l’indemnité d’éviction et donc le bénéfice
du statut[8].
De
même, le bail expiré pour cause de renouvellement et une instance étant en
cours pour fixer le nouveau loyer, le bailleur ne peut exciper d’un défaut
d’immatriculation postérieur à l’expiration du bail précédent[9].
Qu’entraîne le défaut d’immatriculation ?
Une
déchéance du droit au renouvellement et à l’indemnité d’éviction. Plus
généralement l’impossibilité pour le locataire de se prévaloir d’un seul
« avantage » du statut.
Comment le bailleur peut-il mettre en œuvre cette déchéance ?
Il
doit faire délivrer un congé motivé portant refus de
renouvellement et de paiement de l’indemnité d’éviction.
S’agissant
du défaut d’immatriculation, le congé n’a pas à être précédé d’une mise en
demeure enjoignant au locataire à mettre fin à l’infraction.
Le
bailleur peut dénier le droit au renouvellement tant qu’une décision définitive
sur l’indemnité d’éviction n’a pas été rendue[10]
Le ou les locataires peuvent-ils remédier à cette déchéance ?
Ils
peuvent l’éviter ainsi qu’il l’a été dit plus haut, mais ne peuvent y
remédier lorsque la non-immatriculation « est acquise ».
Le ou les
locataires non-exploitants pourraient-ils avancer, qu’après avoir fait cesser
la location-gérance, des obstacles matériels se sont dressés les empêchant de
remettre les lieux en location-gérance ?
Selon
la jurisprudence, il semble que non.
Selon
moi rien ne les empêche en effet de s’immatriculer (tous ou l’un d’entre eux
selon la situation de l’indivision) pour palier à l’absence de locataire
gérant, quitte ensuite à arguer de difficultés pour exercer dans les lieux.
La jurisprudence est disponible sur simple demande.
Eric DESLANDES
Avocat au Barreau de Paris
Prestation de serment du
16 janvier 1987
8 rue des Saints Pères
75007 PARIS
Tél. 06 83 89 91 40
01 40 72 60 45
deslandesavocat@orange.fr
[1] C. Cass.
3ème civ., 1er oct. 1997 n° 95-15842
[2] C. Cass.
3ème civ., 7 juillet 2015 n° 13-23671
[3] C. Cass.
3ème civ., 5 mars 2008 n°05-20200
[4] C. Cass.
3ème civ., 7 nov. 2001 n° 00-12453
[5] C. Cass.
3ème civ., 25 oct. 1983 n° 81-14926
[6] C. Cass.
3ème civ., 1er juin 2010 n° 08-21795
[7] C. Cass.
3ème civ., 1er fév. 1995 n° 93-12537
[8] C. Cass.
3ème civ., 29 sept. 2004 n° 03-13997
[9] C. Cass.
3ème civ., 18 mai 2005 n° 04-11985
[10] C.
Cass. 3ème civ., 7 sept. 2017 n° 16-15012
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire