Cass. 3ème civ., 8 décembre 2004 n° 03-17.902
Article 815-2 du code civil
version en vigueur depuis le 1er janvier 2007
"Tout indivisaire peut prendre les mesures nécessaires à la conservation des biens indivis même si elles ne présentent pas un caractère d'urgence.
Il peut employer à cet effet les fonds de l'indivision détenus par lui et il est réputé en avoir la libre disposition à l'égard des tiers.
A défaut de fonds de l'indivision, il peut obliger ses coïndivisaires à faire avec lui les dépenses nécessaires.
Lorsque des biens indivis sont grevés d'un usufruit, ces pouvoirs sont opposables à l'usufruitier dans la mesure où celui-ci est tenu des réparations."
Dans cette affaire, les héritiers d'un commerçant se voient délivrer un congé avec refus de renouvellement. Le tribunal le valide et déclare les héritiers occupants sans droit ni titre.
L'un des indivisaires fait appel et la Cour juge que "la mise en œuvre d'une action en appel n'est pas une mesure nécessaire ) à la conservation des biens indivis mais un acte d'administration".
La Cour de Cassation casse péremptoirement l'arrêt de la Cour d'appel dans les termes suivants : "Qu'en statuant ainsi, alors que l'appel d'un jugement déclarant valable un congé et ordonnant une expulsion constitue un acte conservatoire, la cour d'appel a violé le texte susvisé."
Cet arrêt est d'autant plus intéressant qu'il statue sous l'empire de la version de l'article 815-2 du code civil, antérieure à sa modification entrant en vigueur le 1er janvier 2007 version qui croit devoir préciser que pour agir de manière conservatoire, l'urgence de la mesure n'est pas requise. La version antérieure quant à elle, n'avait pas cette précision ce qui paradoxalement avait permis à la jurisprudence d'ajouter cette condition d'urgence ou de péril, que la loi ne contenait pas.
Dans cet arrêt, la cour de cassation ne parle ni d'urgence, ni de péril, ni d'imminence d'un dommage...sans doute parce que l'appel est par nature un acte conservatoire. Cette qualification était souvent employée dans ma jeunesse d'avocat. On disait au client qu'un appel à titre conservatoire allait être régularisé par l'avoué, lorsque la cause n'était pas évidente...justement parce que l'on pouvait s'en désister tant que l'on avait pas conclu, ce qui nous permettait de négocier ou de réfléchir aux chances de succès dudit appel.
Par essence, aujourd'hui un appel interjeté peut être stoppé seul par l'appelant, tant qu'il n'a pas conclu au fond dans le délai de trois mois. Par ailleurs, j'ai vu récemment des appels interjetés qui se sont retrouvés mis à néant par ordonnance de la Cour, simplement parce que l'appelant n'avait pas conclu dans le délai de trois mois.
L'on voit bien qu'un acte - la déclaration d'appel- "aussi fragile", peut permettre de conserver une situation, en l’occurrence éviter l'écoulement d'un délai rapide capable de figer en principe définitivement une situation préjudiciable à l'ensemble des indivisaires.
Citons Christian ATTIAS qui dans son excellent livre "L'indivision" paru chez Edilaix ed. de sept. 2008, commente cet arrêt en ces termes : " Un seul indivisaire aurait donc qualité et pouvoir pour saisir la cour d'appel après jugement rendu à l'égard de tous les indivisaires. Toutefois, la qualification ne devrait valoir que pour l'acte d'appel; le délai à respecter peut lui conférer un caractère conservatoire. Il n'en est pas de même pour la poursuite de l'instance d'appel". Effectivement il faut voir ensuite l'objet de l'action en cause pour apprécier le nombre des participants à la poursuite dudit l'appel.
En conclusion, on fait appel et l'on conserve la situation. L'on discute posément ensuite.
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