vendredi 16 mars 2012

La procédure en acquisition de la clause résolutoire et les créanciers inscrits à prendre en compte pour la leur dénoncer


ACQUISITION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE - DEMANDE RECONVENTIONNELLE OBLIGATION DE DENONCER LA PROCEDURE AUX CREANCIERS INSCRITS - INSCRIPTION POSTERIEURE A L'EXPIRATION DU DELAI D'UN MOIS PREVUE AU COMMANDEMENT - VALIDITE : OUI - OBLIGATION DE DENONCIATION : OUI.

Arrêt du 22 mars 2006
N° 385 FS-P+B+R

Article L 143-2 du code de commerce : « Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions.
Le jugement ne peut intervenir qu 'après un mois écoulé depuis la notification. La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu 'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus. »

Dans cette affaire, par acte du 3 février 1995 la bailleresse fait délivrer à sa locataire un commandement de payer un arriéré de loyer. Suite à l'opposition de sa locataire, la bailleresse obtient reconventionnellement des premiers juges et de la Cour d'appel l'acquisition de la clause résolutoire et son expulsion.

Or un établissement financier détenait deux nantissements inscrits sur le fonds de la locataire. Non attrait dans la procédure d'expulsion il assigne la bailleresse en dommages-intérêts « lui reprochant d'avoir commis une faute en s'abstenant de lui notifier la procédure de résiliation judiciaire du bail. »

La cour d'appel déboute l'établissement financier, retenant que la résiliation est devenue effective à l'expiration du délai d'un mois suivant la délivrance du commandement et qu'en ayant inscrit les nantissements postérieurement à cette expiration, l'établissement de crédit n'avait pas acquis la qualité de créancier au sens de l'article L 143-2 du code de commerce.

La cour de cassation n'admet pas ce raisonnement : «Qu'en statuant ainsi alors que le bailleur qui entend poursuivre en justice la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire doit notifier sa demande à tous les créanciers inscrits à la date de celle-ci, la cour d'appel a violé » l'article L 143-2 du code susvisé.


OBSERVATIONS :

C'est l'assignation, c'est-à-dire la demande, qui est la frontière entre les créanciers inscrits qui doivent être pris en compte et ceux qui ne peuvent plus l'être ; ça n'est pas le commandement.

Celui-ci n'est pas à proprement parler une demande de résiliation. En effet la loi est plus générale, elle ne fait pas seulement référence au propriétaire qui poursuit l'acquisition de la clause résolutoire et qui est obligé de délivrer une commandement.

Cet arrêt est le corolaire de deux autres : Cour de Paris, du 2 février 1934 (sem. jur. 1934, 938) Cour de Bordeaux du 6 février 1941 (S. 1941 T), selon lesquels tous les créanciers inscrits postérieurement à l'action en résiliation judiciaire ne peuvent opposer le défaut de notification.

Le redressement judiciaire n'exclut pas le paiement par compensation


DETTE NEE DE REPARATIONS NECESSAIRES A LA CHARGE DU BAILLEUR- DETTE DE LOYER - REDRESSEMENT JUDICIAIRE DU LOCATAIRE - PAIEMENT PAR COMPENSATION : OUI -

CIV 3. 13 février 2002 N° 246


RAPPEL DES TEXTES:

Article 1289 du Code civil: « Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes (...) ».

Article L 621-24 § 1er du Code de commerce : « Le jugement ouvrant la procédure [de redressement judiciaire] emporte de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture. Cette interdiction ne fait pas obstacle au paiement par compensation de créances connexes ».

Dans cette affaire les bailleurs, en l'absence de stipulation expresse contraire du bail, sont à la suite d'un rapport d'expertise judiciaire, considérés comme contraints de remettre en état les lieux loués. Cette remise en état est chiffrée par l'Expert judiciaire. Bien entendu ne sont pas concernées les réparations locatives.

Pendant ce temps, la société locataire qui a contracté des dettes et notamment des dettes de loyer est mise en redressement judiciaire et un plan de continuation est arrêté par un Jugement.
La preneuse veut que ses bailleurs fasse l'avance du montant des travaux de remise en état.

Les bailleurs invoquent la compensation entre le coût des travaux à leur charge et le montant des loyers dus antérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire.

*      La COUR d'APPEL de RIOM rejette la prétention des bailleurs, la déclarant sans objet.
*       Mais Elle est censurée par la COUR de CASSATION qui rappelle les dispositions de l'article L 621-24 § 1cr du Code de commerce.


Sur les travaux incombant au bailleur, la COUR SUPREME rappelle incidemment mais clairement qu'il faut s'attacher à examiner les stipulations expresses du bail pour déterminer leur existence et leur étendue.

Il est bon de se souvenir qu'en l'absence de stipulations du bail sur les grosses réparations, l'article 1719 du Code civil. qui dispose notamment que le bailleur est tenu « d'entretenir » la chose louée « en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée », s'applique.

mardi 13 mars 2012

Circonstances et pommes de terres....nouvelles


ORDONNANCE DE REFERE - RETRACTATION CIRCONSTANCES NOUVELLES - DEFINITION -
CIV 3, 16 décembre 2003, N° 1437


« L'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée.
Elle ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu'en cas de circonstances nouvelles. »

Dans cette affaire, une locataire assigne sa bailleresse en référé, aux fins de voir rapportée une ordonnance (rendue le 5 juillet 2000), ayant constaté la résiliation du bail commercial pour le non-paiement de loyers dans le mois d'un commandement.
La Cour d'appel de CAEN rétracte l'ordonnance et déboute la bailleresse de sa demande en paiement de loyers, en retenant qu'au 30 mai 2000 la locataire était à jour de ses loyers et que n'ayant pas fait état de cette situation à l'audience du 14 juin 2000 devant le Juge des référés (initialement saisi), elle était autorisée à en faire état pour la première fois à l'appui de sa demande en rétractation, cette circonstance devant donc être qualifiée de nouvelle.
La Cour de Cassation interprète strictement les dispositions du Nouveau Code de Procédure Civile et censure la Cour d'Appel dans les termes suivants :
«(...) ne constituent pas une circonstance nouvelle autorisant la rétractation d'une ordonnance de référé des faits antérieurs à la date de l'audience devant le juge des référés qui a rendu l'ordonnance et connus de celui qui sollicite la rétractation ».
OBSERVATIONS: la juridiction des référés est à manier avec précaution. Que l'on se souvienne également qu'une ordonnance de référé a l'autorité de la chose jugée et qu'ayant déclarée acquise la clause résolutoire elle ne peut plus être remise en cause par le juge du fond, dès lors que cette ordonnance n'est plus susceptible d'appel.

lundi 12 mars 2012

Même en référé, l'irrévocable existe


CLAUSE RESOLUTOIRE ORDONNANCE DE REFERE - CONSTATION DE SON ACQUISITION - IRREVOCABILITE - NON RESPECT DES DELAIS ACCORDES - DEMANDE DE RENOUVELLEMENT - SAISINE DU JUGE DU FOND POUR INVALIDER LA DEMANDE - REMISE EN CAUSE DU CONTENU DE L'ORDONNANCE DE REFERE : NON.

CIV. 3, 25 février 2004. Arrêt n° 241 FS-P+B


DANS CETTE AFFAIRE... le bailleur fait délivrer au preneur un commandement de payer un arriéré de loyers visant la clause résolutoire. Le bailleur saisit le juge des référés qui accorde des délais au preneur et suspend les effets de la clause résolutoire précisant de manière tout à fait classique qu'à défaut d'un seul versement d'arriéré à bonne date les effets de la clause résolutoire seraient acquis et l'expulsion du preneur poursuivie. Le preneur ne respectant pas les délais accordés se voit délivrer un commandement de quitter les lieux et attrait devant le juge de l'exécution qui le condamne à quitter les lieux sous astreinte.

Le nœud du problème apparaît lorsque le preneur sollicite le renouvellement de son bail.

Bien entendu le bailleur l'assigne illico pour voir déclarer cette demande « nulle et de nul effet » et se voit donner raison par le TRIBUNAL et la COUR de PARIS qui considèrent que la décision du juge des référés qui a prononcé l'acquisition de la clause résolutoire qui non frappée d'appel est « donc passée en force de chose jugée, peu important l'absence au principal d'autorité de la chose jugée de cette ordonnance ».

A l'appui de son pourvoi en cassation le preneur affirme :

« 1°) que la bonne foi du locataire dans l'exécution de ses obligations » est « de nature à faire obstacle à l'acquisition d'une clause résolutoire » et qu' « il appartient aux juges du fond de caractériser la bonne ou mauvaise foi du locataire avant de pouvoir constater l'acquisition de la clause résolutoire ».
2°) « que l'ordonnance de référé n'a pas, au principal l'autorité de la chose jugée, qu'en se bornant à se référer à l'ordonnance (...) pour énoncer la clause résolutoire acquise la Cour dAppel a violé l'article 488 du Nouveau Code de Procédure Civile. »

La COUR de CASSATION rejette cette argumentation : une ordonnance de référé ne s'impose pas au juge du fond saisi aux mêmes fins que le juge des référés, mais ce principe trouve une exception dès lors que le juge du fond statue dans une instance ayant un objet distinct. Il doit alors respecter les termes de l'ordonnance qui n'ayant pas été frappée d'appel devient irrévocable.

OBSERVATIONS : comment, sous l'empire des dispositions régissant les baux commerciaux, peut-on remettre en cause une ordonnance de référé -non frappée d'appel ou confirmée- ayant accordé des délais qui ne sont pas respectés ? La saisine du juge du fond suffit-elle ? Ces questions sont récurrentes.
La réponse est donnée ici dans l'hypothèse où le juge du fond est saisi à d'autres fins que la demande de délais et de suspension de la clause (voir déclarer nulle la demande de renouvellement).

Mais que se passe-t-il lorsque le juge du fond est saisi aux mêmes fins que le juges des référés ?

La COUR de CASSATION a tranché cette question dans son arrêt du 22 avril 2003 N° 485 : le juge du fond ne peut pas accorder de nouveaux délais.
Je reprend mon analyse de l'époque : il s'agit simplement d'appliquer à la lettre les dispositions de l'article L 145-41 du code de commerce.
Il ne fait pas de distinction entre les effets d'une Ordonnance et d'un Jugement, décisions qui toutes les deux ont l'autorité de la chose jugée par rapport à ce qu'elles tranchent.
Au contraire il évoque chacun des types de décisions en mentionnant celle qui constate la résiliation du bail (par principe l'Ordonnance de référé) et celle qui la prononce (par principe le Jugement). Dès que l'une ou l'autre de ces décisions et donc dès que l'ordonnance de référé acquiert l'autorité de la chose jugée : il est trop tard.

samedi 10 mars 2012

LE BAIL VERT VIENT D'ARRIVER

Depuis le premier janvier 2012 le "bail vert" est rendu obligatoire pour la baux conclus et renouvelés à partir de cette date pour des locaux de plus de DEUX MILLE M² à usage du bureau ou de commerces. Le décret relatif à son contenu est paru le 31 décembre 2011 ; il précise les obligations qui pèsent sur les bailleurs et les preneurs.

vendredi 9 mars 2012

DELAI OFFERT PAR LA CLAUSE RESOLUTOIRE

CLAUSE RESOLUTOIRE - REDACTION- DELAI INFERIEUR A UN MOIS- CONSEQUENCES  

Cass. 3e civ. 8 décembre 2010 n° 09-16939

Une clause résolutoire insérée dans un bail prévoyait qu'elle prendrait effet passé un délai de quinze jours après la délivrance d'un commandement. Un commandement fut délivré, mais, qui conformément aux dispositions d'ordre public de l'article L 145-41 du code de commerce laissait le délai d'un mois au locataire pour se mettre en règle.

La cour de cassation a donné raison à une cour d'appel qui avait déclaré nulle la clause résolutoire.

OBSERVATIONS : Même si le commandement était régulier en la forme, il se trouvait donc vicié "au fond" consécutivement à la nullité de la clause résolutoire ; ce commandement ne pouvait conduire à l'acquisition de la clause mais ne valait que comme simple mise en demeure.

En d'autres termes un commandement régulier ne rattrape pas l'irrégularité de la clause résolutoire, il la subit.
CONGE SANS OFFRE D'IDEMNITE D'EVICTION - MISE EN DEMEURE - OBLIGATION

Cass. civ. 3e 23 novembre 2011, n° 10-24180


Dès lors que le preneur peut régulariser sa situation, le bailleur est tenu de lui délivrer un mise en demeure préalablement à la délivrance du congé.

OBSERVATIONS : le débat de la possibilité de remédier à l'infraction, au manquement, ne doit pas être éludé  ni par le bailleur qui pourrait s'engager dans un procès long et coûteux, ni par le locataire qui a intérêt à garder son bail. La jurisprudence est fluctuante. Aucun argument n'est fixé dans le marbre.

Je conseillerais aux bailleurs de ne pas prendre de risque et sauf dans des cas évidents "d'irremédiabilité" (coups, injures....) de faire délivre par voie d'huissier une mise en demeure.

La mise en demeure, qui doit reproduire à peine de nullité les dispositions de l'article L 145-17 du code de commerce, doit être précise. Mais sa délivrance à elle seule est insuffisante !

Il ne faut pas oublier de démontrer que la ou les infractions visées, ont perduré au-delà du délai d'un mois qui était octroyé au locataire pour se "mettre en règle".

D'ailleurs la mise en demeure pourra aussi viser la clause résolutoire.
LIQUIDATION JUDICIAIRE - CLAUSE RESOLUTOIRE - DEMANDE DE SUSPENSION DES EFFETS PAR LE LIQUIDATEUR

Cass. com. 6 décembre 2011, arrêt n° 10-25689

L'article L. 622-14 du code de commerce n'interdit pas au liquidateur de solliciter des délais de paiement et la suspension des effets de la clause résolutoire sur le fondement des dispositions de l'article L 145-41 du code de commerce.