Affichage des articles dont le libellé est Révision triennale. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est Révision triennale. Afficher tous les articles

mercredi 19 février 2025

Le minimum garanti, la partie variable représentée par un pourcentage du chiffre d'affaires et la révision triennale.

 Tribunal judiciaire, Loyers commerciaux, Paris,

 Jugement du 24 juillet 2024, RG N° 23/02404

 

Problématique traitée

Il n'est pas rare, dans les centres commerciaux de fixer les loyers des boutiques en fonction d'un minimum garanti, la partie fixe, auquel s'ajoute une partie variable résultant de l'application d'un pourcentage au chiffre d'affaires HT du commerçant. Composé de deux parties, le loyer est alors appelé loyer binaire.

Le litige survient lorsque le locataire qui pressent une baisse de la valeur locative veut obtenir la révision de la partie fixe du loyer qu'il a acceptée.

Dans cette affaire les parties sont liées par un bail à loyer binaire.

Le loyer minimum garanti est indexé sur l' ILC.

Le loyer variable additionnel consiste, quant à lui à "la différence positive entre un pourcentage du chiffre d'affaires hors taxes, fixé à 8%".

La locataires sollicite auprès de la bailleresse et de son gérant, la révision du loyer à la valeur locative et à la baisse en l'occurrence.

La bailleresse lui répond que la révision triennale prévue par les article L. 145-37 et s. du code de commerce ne s'applique pas aux loyers binaires.

La locataire notifie par acte extra judiciaire un mémoire préalable puis dans son dernier mémoire, sollicite outre bien sûr la réduction du loyer à une certaine somme, une mesure d'expertises subsidiaire. Elle fonde sa valeur locative, sur deux rapports d'expertise unilatérale.

Elle estime que le juge des loyers est compétent, même s'il n'est pas rendu compétent expressément par le bail et qu'en l'espèce le bail contient une clause qui stipule expressément : " les Parties restent fondées à voir réviser le loyer en application des dispositions d'ordre public des article L 145-37 et L. 145-38 du code de commerce." Elle ajoute que la révision triennale est l'unique moyen en l'espèce pour le preneur d'obtenir judiciairement un diminution du loyer facturé, car en cas de renouvellement une clause du bail prévoit un plancher, or le loyer minimum, avec le jeu des indices, ne pourra qu'augmenter, ce qui pour le preneur n'est pas économiquement viable. Tels sont ses arguments.

Pour la bailleresse la révision triennale ne peut être recevable. Les parties, en choisissant un loyer binaire ont volontairement exclu l'application des règles de la révision triennale elle-même faisant partie du statut des baux commerciaux. Elle réplique que la clause citée par la locataire ne parle pas de loyer binaire et n'est pas adaptée à celui-ci.

Quelle est la solution apportée par le juge ? Quels moyens factuels et juridiques retient-il ?

Il n'étonnera personne que le juge s'en soit remis à la volonté des parties, qu'il l'ait examinée.

On y découvrira l'attractivité de ce que les parties ont décidé au moment du renouvellement du bail dans la détermination de la volonté des parties.

Le juge retient une clause du bail d'origine : "Nonobstant la clause d'indexation ci-dessus, les Parties restent fondées à voir réviser le loyer  en application des dispositions d'ordre public des articles L. 145-37 et  L. 145-38 du code de commerce."

Il la met en lien avec la clause concernant le renouvellement du bail et ce qui doit être fait pour le loyer du bail renouvelé : "le loyer minimum garanti sera fixé judiciairement selon les modalités prévues aux R. 145-23 et suivants du code de commerce"... 

Il en conclut  d'une part que "par une disposition expresse les parties ont entendu se conformer aux règles légales de révision du loyer" et ce par "une disposition expresse" qui n'exclut pas la compétence du juge des loyers commerciaux " en cohérence" avec la clause concernant la révision du loyer minimum garanti et d'autre part que le juge des loyers commerciaux est compétent pour examiner la demande révision du loyer minimum garanti.

Un expert judiciaire sera désigné, chaque partie ayant produit un ou plusieurs rapports d'experts privés sans qu'un seul d'entre eux ne soit particulièrement complet et convainquant. 

Se pose alors la question et si une telle clause n'avait pas existé à propos de cette révision, si le juge n'aurait pas eu la possibilité de prendre en compte des éléments extrinsèques au contrat et notamment le comportement antérieur des parties au litige. La réponse est positive si l'on prend en compte la dernière jurisprudence de la Cour de cassation en matière de loyer binaire et de fixation du prix du loyer minimum garanti au moment du renouvellement du bail. L'article de Me Jean-Pierre BLATTER (Loyer binaire et office du juge AJDI 2024 p 614) est à cet égard pédagogique.

 

Autre particularité intéressante de ce jugement, qui doit attirer notre attention sur la volonté des juges, débordés, de voir les parties aboutir à une solution amiable, les parties se voient enjoindre de consulter un médiateur qu'il désigne, après le dépôt de la note de synthèse de l'expert judiciaire, chargé de recueillir les critères pour fixé le prix du loyer révisé.

Je suis enclin à accepter cette méthode et à la conseiller dorénavant à mes clients. En effet, même avec cette obligation à consulter un médiateur à titre d'information, l'expertise donc le procès, avancent, c'est ce qui compte, et la note de synthèse de l'expert vient éclairer les parties et leurs avocats sur le sens hautement probable de la décision future...ce qui ne peut qu'inciter des avocats raisonnables et experts des baux commerciaux et des jurisprudences de tribunaux à négocier, en accord avec leur client(e) et à ne pas s'entêter à batailler inutilement.

Développez vos solutions amiables, dès le départ avec des Avocats ! N'attendez-pas que le litige s'envenime. Consultez-nous dès le premier signe d'opposition. Croyez-moi un procès met en péril votre qualité de vie !

 

 

 

 

 

 

 

 

 


 

 

dimanche 2 juin 2019

La révision triennale et la présence dans le bail d'une clause d'échelle mobile


TGI PARIS LOYERS COMMERCIAUX 6/10/2011 n°2011-032447
Cass. 3ème civ. 20 mai 2015 n° 13-27.367 publié


Texte en cause : L.145-33, L.145-38 et L.145-39 du code de commerce. 

Soit un bail, assorti d’une clause d’échelle mobile.

Soit une locataire qui souhaite que s'applique la valeur locative supérieure au loyer d'origine mais inférieure au loyer issu de la variation indiciaire.

Soit une bailleresse qui s'appuyant sur le fait que la locataire n’apporte pas la preuve que l’un des deux modes de révision peut conduire au déplafonnement du loyer révisé et que le bail contient une clause d'échelle mobile, demande à ce que celle-ci s'applique pour aboutir finalement à un loyer indexé, supérieur à la valeur locative.

Face à l'absence des conditions de déplafonnement, tant selon L. 145-38 que 39, le tribunal va donner effet au loyer en cours, qui sera le loyer plancher EN RETENANT que le loyer en cours sera le loyer d’origine indexé par le jeu de la clause d'échelle mobile. Il exclura dès lors l'application de la révision triennale.

La même affaire ira jusque devant le Cour de cassation qui dans son arrêt du 20 mai 2015, confirmera la solution donnée par le Tribunal.

Pourtant l'argumentation de la locataire dans son pourvoi était "audible": comment exclure l'application d'un texte d'ordre publique, l'article L.145-38 en l’occurrence ? L'application de ce texte, permettait à la valeur locative située entre le prix plancher et le prix résultant de la variation indiciaire, de s'appliquer, le prix plancher étant celui résultant du loyer d'origine ou celui résultant de la dernière révision triennale amiable ou judiciaire. Dès lors rehausser le prix plancher en appliquant la clause d'indexation, pour le rendre supérieur à celui de la valeur locative, revenait à priver d'effet l'article L.145-38.

mardi 14 février 2012


DEMANDE DE REVISION TRIENNALE - PRESCRIPTION BIENNALE - CHAMP D'APPLICATION - Civ 3ème 13 février 2002 N° 257  exposé et commenté par Eric DESLANDES, Avocat au Barreau de Paris, 8 rue des Saints Pères 75007 PARIS Tél. 01 40 72 60 45 deslandesavocat@orange.fr

Textes appliqués :

L 145-38 § 1er du Code de commerce : « La demande en révision ne peut être formée que trois ans au moins après la date d'entrée en jouissance du locataire ou après le point de départ du bail renouvelé.»
L 145-60 du Code de commerce : « Toutes les actions exercées en vertu du présent chapitre se prescrivent par deux ans. »

Teneur de l’arrêt

Dans cette affaire, le renouvellement du bail litigieux intervient le 1er janvier 1990. Le 30 octobre 1995, les bailleurs notifient aux locataires par lettre RAR un mémoire en révision du loyer à la hausse.
Les locataires prétendent que cette demande est tardive.
La COUR d'APPEL de GRENOBLE, décide que la présentation de cette lettre est effectivement tardive et donc inopérante au motif que les demandes en révision sont soumises à la prescription biennale de l'article      L 145-60 du Code de Commerce. Selon Elle, cette lettre RAR aurait dû être envoyée avant le 1er janvier 1995, soit dans les deux ans suivant la première date utile pour former la demande en révision triennale (en l'espèce cette première date utile est le 1er janvier 1993 cf.  l'article l 145-38 du Code de commerce).

La COUR de CASSATION censure cette décision : la prescription biennale ne court que du jour de l'expédition de la demande de révision par le bailleur au locataire.
COMMENTAIRE

La demande en révision échappe à la prescription biennale tout simplement parce qu'elle n'est pas une action en justice. Cette demande de révision n'est en fait qu'un préalable à une éventuelle action en justice : la Loi fait obligation au bailleur de s'adresser d'abord au locataire, soit par acte extrajudiciaire, soit par lettre RAR.

L'article L 145-60 du Code de commerce signifie que le conflit que peut générer l'envoi de cette demande de révision doit être porté devant la justice dans un délai de deux ans.
Il est utile de rappeler que :  le délai de trois ans de l'article L 145-38 § 1er du Code de commerce est un délai minimal, la demande en révision doit être chiffrée ou chiffrable, le nouveau loyer ne prendra effet que du jour de la demande.