mercredi 28 novembre 2012

REVISION JUDICIAIRE L 145-39


Le statut des baux commerciaux prévoit deux systèmes de révision du loyer en cours de bail. A côté de la révision légale de l'article L 145-38 du code de commerce, qui donne la possibilité pour le bailleur de demander la révision triennale du bail en fonction de la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction ou de manière plus limité en fonction de la variation de l'indice des loyers commerciaux (l'ILC), existe une autre technique issue des dispositions des articles L 145-39 et R 145-22 al. 1er du code de commerce. Il s'agit d'une modalité de révision, légale elle aussi, qui a pour rôle d'encadrer un autre mode de révision cette fois-ci, purement conventionnel, à savoir, le jeu (généralement automatique) d'une clause d'échelle mobile, fondé sur la variation d'un indice (I). En effet, afin de ne pas aboutir à un loyer hors de proportion avec la valeur locative des lieux par le seul jeu de la clause d'échelle mobile, le législateur a instauré une protection d'ordre public. Tel est le rôle assigné à l'article L 145-39 en permettant à chacune des parties, de solliciter l'intervention du juge pour arbitrer le prix du loyer, à la hausse ou à la baisse, en fonction de la réalité économique. Ce système a été mis en place par l'ancien article 28 du décret du 30 septembre 1953 portant statut des baux commerciaux. En d'autres termes, par ce texte d'origine, depuis codifié, il s'est agit pour le législateur d'empêcher que le loyer conventionnel ne s'éloigne de la valeur locative à laquelle fait référence l'article R 145-22 susvisé (II.).
L'article L 145-39 du Code de commerce qui utilise le mécanisme de la clause d'échelle mobile pour en limiter les effets, oblige à examiner le mécanisme de cette variation.
Mais ledit mécanisme ne pourrait être compris sans que soit préalablement définie la clause d'échelle mobile.
Définition de la clause d'échelle mobile
Il s'agit d'une clause qui, insérée dans un contrat à exécution successive consiste à faire varier automatiquement, la valeur d'une prestation - le loyer dans le cas du bail- en fonction d'un indice économique ou du prix d'une denrée ou d'un service, de manière à conserver sa valeur par rapport à l'évolution des prix, cette variation intervenant sans qu'il y ait lieu de recourir à une discussion ou à une mesure d'expertise. Ce dernier point peut d'ailleurs être considéré comme un avantage par rapport au système de la révision légale.
Il convient de ne pas confondre ce mode de modification du loyer avec celui résultant de l'application d'une clause-recettes qui lie conventionnellement le montant du loyer à celui du chiffre-d'affaires ; ce type de révision échappant aux dispositions du code de commerce donc à celles de l'article L145-39.
Il résulte de la définition de la clause d'échelle mobile que pour comprendre le fonctionnement et l'encadrement de ce système de jeu de la clause d'indexation, il convient d'examiner l'élément clef qui le compose : l'indice (A) et d'analyser les effets de sa mise en œuvre (B).
A.- L'indice
Son choix (a.) conditionne la validité de la clause, sa variation (b.) les effets des celle-ci.
Le législateur est intervenu dans chacun de ces domaines pour limiter les pratiques contractuelles pouvant conduire à des effets inflationnistes.
a. Le choix de l'indice
Le principe général qui guide le choix
Ne sont autorisés que les indices ayant une relation directe avec l'objet du contrat ou l'activité de l'une des parties (quand bien même il ne s'agirait pas d'une activité principale Cass. Civ. 7 mars 1984 Bull civ. I, n° 91)
Par exemple le loyer d'un bail à usage de boulangerie pourrait être indexé sur le prix du pain ou sur celui du quintal de farine.
Ce principe est tiré de l'article L 112-2 du Code monétaire et financier qui est l'ancien article 79 de l'ordonnance du 30 décembre 1958 modifié par l'ordonnance du 4 février 1959 et dont les dispositions prohibent l'usage des indices n'ayant pas une telle relation directe.
Les indexations prohibées
Ce texte prohibe également la rédaction de toute clause prévoyant « des indexations fondées sur le salaire minimum de croissance » et « sur le niveau général des prix ou des salaires ».
Les indices utilisables, prévus par le législateur
Enfin le législateur guide les parties dans leur choix en réputant deux indices en relation directe avec l'objet d'une convention portant sur un immeuble bâti, donc avec un bail :
- l'indice national du coût de la construction publié par l'INSEE (ICC) ;
l'indice trimestriel des loyers commerciaux (ILC) [L 112-2 modifié par l'article 47 de la loi 2008-776 du 4 août 2008] ;
Il convient de préciser que si l'indice national du coût de la construction est d'application générale, l'indice trimestriel des loyers commerciaux ne s'applique que pour certaines activités commerciales définies par décret.
En application du décret 2008-1139 du 4 novembre 2008, sont concernés les loyers de locaux affectés aux activités commerciales, y compris celles exercées par les artisans. Selon le MEMENTO EXPERT DES EDITIONS FRANCIS LEFEBVRE 2009/2010 (cf. page 495 § 48626) « une lecture littérale du texte incline à penser que seuls les artisans qui exercent par ailleurs des actes de commerce ont la possibilité d'adopter l'ILC (indice des loyers commerciaux) ».
L'utilisation de l'ILC n'est pas obligatoire.
D'un point de vue pratique l'ILC a été instauré à la suite de l'intervention de certaines organisations professionnelles qui souhaitaient à la fin de l'année 2007 endiguer les fortes hausses des loyers commerciaux en raison des variations importantes de l'ICC.
II  a fallu que le législateur apporte une exception à l'une des prohibitions retenues à l'article L 112-2 du code monétaire et financier, ladite exception figurant dans la loi LME du 4 août 2008, en autorisant de manière limitée certes, l'indexation de loyers de certains commerces (définis par décret) sur le niveau général des prix.
L'illicéité de l'indice et ses conséquences
Un indice qualifié d'illicite par le juge peut-il porter atteinte à la validité du bail même si le bail prévoit cette sanction en qualifiant de déterminante la clause d'indexation ?
Le jurisprudence répond par la négative (Cass. 3e civ. 9 juillet 1973 N° 72.12-660 Bull. civ.
III    n° 467, Cass. 3e civ. 14 juin 1983 81 n° 81.12-764 Rev. Loyers 1983 p 446). Seule la nullité de la clause est retenue ; la nullité du contrat dépendrait en quelque sorte de la volonté du bailleur qui pourrait remettre en cause le droit au renouvellement qui est un des droits fondamentaux reconnu au locataire par le statut des baux commerciaux.
b. Le sens de la variation de l'indice
La variation de l'indice doit être prise en compte quel que soit son sens, en conséquence le loyer indexé pourra être inférieur ou supérieur au loyer avant le jeu de la clause d'échelle mobile.
Le bailleur peut-il en accord avec le locataire ne retenir qu'un indice qui varie à la hausse ? Il n'existe pas de jurisprudence en la matière.
En matière de baux d'habitation une réponse ministérielle ne l'exclut pas (Rep. Min. 40721 8/07/96).
B.- La mise en œuvre de la variation de l'indice et ses effets
Une fois le bon indice retenu, ce sont les parties qui décident de la périodicité de la prise en compte de son évolution (a.), ce qui a pour effet d'activer le jeu automatique de la clause d'indexation (b.).
a.   La périodicité de la révision
En générale la révision est annuelle. Cette périodicité ne risque pas d'être confondue avec celle, triennale, de la révision légale.
L'avantage de la présence de la clause d'échelle mobile dans le bail réside dans cette fréquence. Point n'est besoin d'attendre trois années comme pour la révision légale.
Le principe de la liberté contractuelle a pu amener les parties à prévoir une période de variation de l'indice supérieure à celle de la périodicité de la variation du loyer prévue au contrat.
L'effet inflationniste qui pouvait résulter d'un tel comportement a été bloqué par le législateur qui, dès 1959 (soit près de six ans après l'arrivée du statut de baux commerciaux), a interdit que la période de variation de l'indice déborde celle de la variation du loyer.
En revanche les parties peuvent prendre pour base de l'indexation un indice antérieur à l'origine du bail (CA PARIS 28 AVRIL 1988 n° 86-12.702 16ème chambre B Sté SOFIBUS/ STE SMT)
La période de révision n'est pas uniquement liée à l'écoulement d'une période déterminée et fixe. Les parties peuvent prévoir que la révision selon la clause d'échelle mobile aura lieu lorsque la variation de l'indice aura atteint un certain seuil (Cass. Com. 27 janvier 1960 n° 2.116 Civ. 54, Bignon c/ Limousin : Bull. civ. III n° 40).
b.   Les conséquences dans les rapports contractuels, liées à la présence de la clause d'échelle mobile.
Les parties ont une certaine latitude pour agir sur le régime de la clause d'indexation.
Le bailleur fera jouer la clause auprès du locataire sans formalisme particulier : il suffit que le contenu de la clause exprime l'existence d'une variation automatique (Cass.3ème civ. 2octobre 1985 Loyers et copropriété 1986 comm. 33 et Cass. 3ème civ. 5 février 1992, n° 89.20-378 GP 1992 1 p 369, commentaire Jehan-Denis BARBIER).
Il a été jugé que stipuler que le loyer « sera révisable », suffisait (Cass. Civ. 23 février 1982, Rev. Loy. 1982, 250).
En conséquence :
         l'absence de demande en révision du bailleur ne dispense pas le preneur de régler le loyer résultant du jeu de la clause d'échelle mobile à condition toutefois, que le bailleur ait calculé lui-même le montant du nouveau loyer et ait porté ce dernier à la connaissance du preneur ;
         si le preneur attend que la révision soit demandée alors même que le montant du nouveau loyer a été porté à sa connaissance, il s'expose à ce qu'un commandement de payer visant la clause résolutoire lui soit délivré ;
         l'absence de révision du loyer par le bailleur durant plusieurs années, ne vaut pas en elle-même renonciation au jeu de la clause d'indexation (Cass. 3e civ. 26 janvier 1994, AJPI, 1994 p 360 obs. J-P BLATTER), sauf une intention contraire manifestée sans équivoque.
Sur ce dernier point, il est intéressant de relever que si la prescription quinquennale de l'article 2224 du code civil (qui a fait disparaître l'ancien article 2277), peut atteindre le loyer et l'action en paiement qui lui est propre, elle n'atteint pas l'indexation, de sorte qu'il est possible pour le bailleur de demander les loyers non prescrits au montant résultant d'une indexation ininterrompue depuis la période de référence (CA TOULOUSE, 3e chambre 8 juillet 2004 Loyers et copropriété 2005 comm. 42 obs. VIAL PEDROLETTI). En utilisant le même principe, les erreurs d'indexation peuvent être réparées depuis le début du bail, et non pas « sur la base du loyer payé à la date du point de départ des cinq années de prescription » (TI PUTEAUX, 8 octobre 1996 RL 97 p. 252 obs. G. AZEMA).
L'étude de l'article L 145-39 du code de commerce, qui comporte « un système de révision qui lui est propre » (Jean-Pierre BLATTER Droit des Baux commerciaux ed. LE MONITEUR), impliquait obligatoirement l'étude du jeu de la clause d'échelle mobile, puisque c'est à partir du quantum du loyer en résultant, que cette révision pourra être demandée et le loyer éventuellement ajusté à la valeur locative.
Mais, ce mode de révision qui dans son mécanisme fait appel à des concepts qui lui sont propres (A.-) se rapproche de celui de la révision triennale et n'exclut pas cette dernière (B.-)
A.- SON MECANISME
a. Condition de recevabilité de la demande de révision
Il est indispensable que le loyer fixé contractuellement ou par décision judiciaire se soit trouvé augmenté ou diminué de 25 %, PAR LE JEU DE LA CLAUSE D'ECHELLE MOBILE.
Le texte prévoyant expressément l'hypothèse de l'augmentation et celle de la diminution, si le bail stipule que seule l'augmentation sera prise en compte, le mécanisme ne peut pas jouer (jurisprudence CA DOUAI 2è ch. 2è section 21 janvier 2010 n° 08/08568 Sté Palocaux c/ SARL Chattawak Distribution cf. Dictionnaire permanent Gestion immobilière p 483 § 214).
Le texte ne prévoyant pas d'autre condition, la seule variation suffit à permettre d'intenter l'action en révision, même si le montant résultant de l'application de l'indice n'a pas été appelé par le preneur (TGI PARIS 7 janvier 2010 The Conran Shop c/ Le Bon Marché, loyers et copr. 2010, n° 78 p. 19 note Ph. Hubert Brault).
Lover de référence
La loi dispose qu'il s'agit d'apprécier la variation par rapport « au prix précédemment fixé contractuellement » d'une part ou par « décision judiciaire », d'autre part.
Dans le premier cas, il s'agit du loyer initial ou du loyer qui aurait été modifié en cours de bail en fonction d'un avenant, donc là encore, conventionnellement.
Dans le second cas, il s'agit du précédent loyer réajusté en application des dispositions de l'article L 145-39.
En aucun cas il ne fait prendre en compte le loyer issu du dernier rajustement effectué en application de la clause.
Prenons un exemple concret : soit un loyer d'origine de 5 000 € (cinq mille euro). Imaginons que l'indice choisi était, au moment de la fixation de ce loyer, 10.
Cet indice atteint à un moment donné, par exemple le 20 janvier 2012, la valeur de 13.
Le loyer atteint donc la valeur de 6 500 €, obtenue par l'opération suivante 5 000 € x 13 divisé par 10
Le quart du loyer d'origine est de 1 250 € ; l'augmentation est de 1 500 € soit de plus du quart du montant du loyer : le locataire demande donc la révision le 20 janvier 2012.
Le juge va statuer une à deux années plus tard, mais va fixer la valeur locative à compter du 20 avril 2002.
Admettons qu'il la fixe à 6 000 €. Comme au 20 janvier 2012, jour de la demande en révision, l'indice était de 13, c'est ce taux d'une part et le prix de 6 000 € d'autre part, qui serviront d'éléments fixes dans les règles de trois destinées à calculer les augmentations ultérieures.
Ainsi si l'indice passe à 18 le loyer sera alors :
6 000 X 18
................ = 8 370 €
13
tel est le résultat de l'adaptation de la clause d'échelle mobile et la clause d'indexation recommence à jouer sur ce nouveau loyer. Mais il ne faut en aucun cas calculer ainsi : 5 000 € (le loyer d'origine) x 18
................................................. = 9 000 € ;
10
Cette somme représenterait alors le montant du loyer issu du jeu normal de la clause d'échelle mobile.
Ce mode spécial de révision ne doit pas être confondu avec l'application conventionnelle de la clause d'échelle mobile ; ainsi, par exemple, le bail peut très bien prévoir que ladite clause ne trouvera à s'appliquer que lorsque l'indice qui sert de référence aura augmenté de 10 % ; une telle clause n'est pas nulle (Cass. Com. 27 janvier 1960 Bignon c/ Limousin Bull. civ. III n° 40).
Cas où la révision est impossible
Toute révision est impossible lorsque le loyer total a été payé d'avance, la dette étant alors éteinte (Cass com 5.01.1961 Bull civ III N° 8).
Cependant si une part seulement du loyer a été payée d'avance, la révision ne peut être admise que sur celle faisant l'objet de versements périodiques (Cass. 3ème 12.12.1968 ann. Loyers 1969.1577).
b. Procédure
Auteur de la demande en révision
Bailleur ou preneur. Peu importe depuis l'arrêt du 16 juin 1993 (Cass. 3e. civ de Grammont / Sté Maine Restauration Rev. Huissiers 1993 1051).
Au départ la jurisprudence estimait en effet qu'en période de hausse indiciaire par exemple, c'était le locataire qui avait intérêt à agir pour limiter cette hausse par la valeur locative supposée alors plus faible et qu'en période de baisse, c'était au seul bailleur d'agir pour limiter cette baisse par une demande d'application d'une valeur locative supposée plus forte.
Mais il se pouvait aussi que la valeur locative aille dans le même sens que les indices et au- delà de la valeur résultant de leur variation. La jurisprudence avait prohibé cette pratique et par exemple en cas de hausse indiciaire supérieure à 25% avait interdit au bailleur de solliciter l'application de la valeur locative dès lors qu'elle était supposée supérieure à la hausse résultant de l'indice.
Pourquoi ? Car les juges estimaient que l'article 28 du décret (aujourd'hui l'article L 145-39) avait pour objet « non pas d'amplifier les effets de la clause d'échelle mobile, mais de jouer un rôle modérateur » (Cass. 3e Civ. 16 juin 1993 précité).
La Cour de cassation a écarté cette jurisprudence ayant en effet estimé que l'article R 145-22 (art. 28 du décret de 1953 avant la codification de mars 2007 de la partie réglementaire code de commerce) ne contenait aucune disposition de nature à restreindre le pouvoir d'appréciation du juge qui doit seulement fixer le montant du loyer à la valeur locative. Ce mode de raisonnement provient de l'application de l'adage selon lequel, « là où la loi ne distingue pas, il n'y a pas lieu de distinguer».
Moment auquel la demande en révision peut être formée
Il s'agit d'appliquer simplement la règle concernant la recevabilité : c'est à partir du jour où le loyer a varié de plus ou moins 25 % que la demande peut être formée.
En théorie la demande pourrait être formée à l'issue de la première année d'application de la clause si l'indice évoluait immédiatement de 25 %.
Forme de la demande en révision
Elle doit être formée soit par exploit d'huissier, soit par lettre RAR (art. R 145-20 § 2).
Aucune mention légale n'est exigée par les textes (CA PARIS 24 janvier 1957 Gaz. Pal. 1957, 1, 113). Cependant la demande doit préciser à peine de nullité le montant du loyer demandé ou offert (art. R 145-20)
Le rôle du juge des loyers (qui est le Président du Tribunal de Grande Instance ou le juge qui le remplace
Le rôle du juge, selon l'article R 145-22 du code de commerce, est de fixer le loyer à la valeur locative (Cass. 3e civ. 15 janv. 1992, JCP G 1992, IV, n° 762), quel que soit l'auteur de la demande en révision et quel que soit le sens de la variation indiciaire.
On indiquera très sommairement pour ne pas alourdir l'exposé que la valeur locative tient compte largement des prix du marché mais résulte de l'application par le juge de critères légaux issus de l'article L 145-33 du code de commerce.
Le loyer fixé par le juge prend effet au jour de la demande (art. R 140-20 § 4 du Code de commerce).
C'est également au jour de la demande de révision que la valeur locative déterminée remplace le loyer en cours (R 145-22 § 2). L'indexation recommence donc à jouer dès ce moment.
Corrélativement, la partie au procès qui a demandé la révision et qui donc, a proposé une valeur locative, peut modifier sa prétention à la hausse en cours de procédure. Ainsi, ce n'est qu'à compter de la notification des nouvelles prétentions (Cass. 3è civ. 23 février 1994, n° 91.20-005, Rev. Loyers 1994 447) que le nouveau prix réclamé prendra effet. Il s'agit d'appliquer les dispositions de l'article R 145-21 § 2.
La procédure sera menée sur mémoire devant le Juge des baux commerciaux près du Tribunal de Grande Instance dans le ressort duquel se trouve l'immeuble sur lequel porte le bail. Concrètement, la partie qui a effectué la demande en révision auprès de l'autre partie au bail, va exposer ses moyens de fait et de droit pour obtenir la révision du loyer et si possible au montant qu'elle souhaite. Cet exposé prend la forme d'un mémoire qu'elle envoie par lettre recommandé avec AR à l'autre partie, suivant les prescriptions de l'article R 145-26 du code de commerce.
Ce mémoire pourrait tout à fait être remis par voie d'huissier.
C'est ensuite au plus tôt un mois après la réception de ce mémoire par son destinataire, que le juge des loyers pourra être saisi par voie d'assignation (qui peut être succincte, car elle n'a pas à contenir obligatoirement toute l'argumentation que contient déjà le mémoire).
Il convient de souligner que c'est la mémoire qui interrompt la prescription de l'action en révision, de deux ans qui court à compter de la demande en révision.
Durant le cours de l'instance en révision
Selon l'article L 145-57 § 1 auquel renvoie l'article R 145-20, si le loyer n'a pas encore été fixé provisionnellement par le juge, le locataire est tenu de payer les loyers courants.
En conséquence
Il est logique d'analyser les conséquences de la procédure instaurée par l'article L 145-39 sur le quantum du loyer qui peut être retenu.
La révision peut aboutir à une fixation de la valeur locative plus élevée que le loyer résultant de l'indexation même lorsqu'elle est à la hausse et a contrario à une fixation de la valeur locative plus basse que le loyer résultant d'une indexation à la baisse.
Ensuite, une révision sollicitée par le locataire ne peut en aucun cas aboutir à la fixation d'un loyer au montant inférieur au montant du loyer initial avant le jeu de la clause d'échelle mobile (CA Paris 22 avril 1980, Gaz. Pal. 1980, 2, jurispr. 608).
Si les parties ne peuvent pas interdire dans le bail le jeu de l'article L 145-39, ce système peut être contourné par le jeu de la révision triennale pouvant aboutir à un loyer égal à la valeur locative. L'on peut donc parler d'une relative autonomie de l'article L 145-39.
B.- UNE INDEPENDANCE RELATIVE
Comme l'article L 145-38, l'article L 145-39 est d'ordre public (a.). Au surplus les deux actions en révision peuvent se cumuler (b.).
a. Le caractère d'ordre public des dispositions de l'article L 145-39 et ses conséquences.
Les dispositions de l'article L 145-39 (comme celles de l'article L 145-38) sont, aux termes de l'article L 145-15, d'ordre public, ce qui signifie que toute clause qui a pour effet de faire échec à ce système est nulle. Tel est le cas de la clause par laquelle les parties s'engagent à ne pas demander en cours de bail la révision du prix fixé d'un commun accord pour la durée du contrat (Cass com. 20.05.1963 Bull civ III234).
La nullité de la clause n'affecte pas le bail entier, même si une clause prévoyait la nullité du bail en cas de nullité de la clause de révision (Cass civ 3 20.02.1969 Bull civ n° 165).
Mais si les conditions des révisions légales ne peuvent être modifiées ou a fortiori écartées expressément lors de la signature du bail, il n'en va pas de même lors de son exécution. Autrement dit, en cours de bail, si bailleur et preneur y consentent, le mécanisme de la fixation du loyer révisé peut résulter de la seule volonté des parties (Cass. Com. 14.10 1963 Bull civ III 404, Cass 3è civ 30.01.2002 RJDA 4/02 n° 361, Cass. 3è civ 5.04.2005 RJDA 12/05 n° 1324).
b. Le cumul des actions en révision
Ce ne sont pas les effets des deux modes de révision légales qui se cumulent mais les actions.
En d'autres termes les actions peuvent coexister parce que leurs conditions d'ouverture sont simultanément remplies.
L'expression « en outre » par laquelle débute l'article L 145-39 démontre que le législateur n'a pas entendu exclure la révision du loyer prévue par l'article L 145-38 même en présence d'un bail contenant une clause d'indexation.
En d'autres termes ce ne sont pas les effets des deux modes de révision légales qui se cumulent mais les actions.
De plus la jurisprudence a interdit à chaque partie de renoncer dans le bail, donc par anticipation, à l'application des articles L 145-37 et L 145-38 du code de commerce qui encadrent la révision triennale.
En conséquence :
-   il est admis que si les conditions de révision des articles L 145-38 et L 145-39 sont réunies, les parties ont le choix entre les deux actions (CA Paris 3è civ. 16 décembre 1998 administrer mars 1999 p. 23 ; Loyers et copropriété 1999 comm. 126) ;
-    il est admis également que la révision de l'article L 145-38 peut être demandée si les conditions de la révision contractuelle ne sont pas réunies (Trib. civil Lille 21 juin 1960 Gaz. Pal. 1960, 2, p 248.), même si l'indice disparaît (Art. R 145-22) ou encore si les parties, en cours de bail renoncent de manière non équivoque à la révision consécutive à une indexation (la renonciation en pouvant résulter du simple fait que le bailleur ne se soit pas prévalu de l'indexation pendant plusieurs années selon une jurisprudence constante).
Ainsi le bailleur ou le locataire pourront solliciter celle des variations indiciaires qui leur est la plus avantageuse, ou bien solliciter la valeur locative.

lundi 19 novembre 2012

Interruption de la prescription biennale en matière de fixation du prix du loyer du bail renouvelé

Cass. 3ème civ. 17 octobre 2012 
N° 11-21.646




En l'espèce, un locataire envoie en lettre RAR, seule forme autorisée par les textes, son mémoire en demande de fixation du loyer renouvelé, quelques jours d'ailleurs avant l'arrivée de la prescription biennale.

Le bailleur ne réclame pas ladite lettre.

Les deux ans écoulés, le preneur notifie son mémoire par voie d'huissier.

Cette manière de procéder est validée par la Cour de Cassation qui rejette le pourvoi du bailleur.

En d'autres termes, ce qui compte c'est la date d'envoi du mémoire à condition d'une remise effective ultérieure dudit mémoire à son destinataire, même si la remise est effectuée après l'écoulement de la prescription.

mardi 7 août 2012

REINSTALLATION DU LOCATAIRE ET ECHEC AU DROIT DE REPENTIR FACE A UN BAILLEUR USUFRUITIER ET NU-PROPRIETAIRE

Cass. civ., 31 mai 2012, n° 11-17.534, n° 658 P+B
SCI La Pierre de l'Ile -de-France et a. c/ Sté Daudon et Cosuti



La preuve : c'est un mot magique et pourtant, la question de son apport reste un écueil récurrent.

On croit maîtriser son droit....à tort. En voici un exemple.

Dans cette affaire, des bailleurs, une SARL usufruitière et une SCI nu-propriétaire donnent congé a leur locataire avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction.

Puis ils exercent leur droit de repentir tiré des dispositions de l'article L 145-58 du code de commerce.

La locataire avait acheté, la veille de la réception de l'acte d'huissier contenant droit de repentir, des parts sociales d'une société contenant transfert de droit au bail. L'acte de cession était sous seing privé. Jusqu'ici par de problème.

Comment devait-elle le prouver et à qui devait-elle démontrer l'antériorité de l'acquisition de son nouveau bail par rapport à la date de l'exercice du droit de repentir ?

Je rappelle que face à elle,  la locataire avait une commerçante, la SARL usufruitière et une non-commerçante, la SCI nue-propriétaire.....

Je crois que tout le monde sait maintenant où se situait le problème.

La cour de cassation a donc eu la position suivante qui se décompose en deux temps : 1°) il fallait pour la locataire apporter la preuve de l'acquisition des parts (donc du bail) vis à vis tant, de l'usufruitière que de la nue-propriétaire.

Comment la cour motive-t-elle ce qui scelle le destin de la locataire ? Je cite la règle posée par la cour : "l'usufruitier ne pouvait, sans le concours du nu-propriétaire, faire valoir son droit de repentir et que la validité de l'exercice de ce droit devait donc être examiné au regard de l'opposabilité tant au nu-propriétaire qu'à l'usufruitier de l'antériorité" par la locataire de l'acquisition des parts sociales.

2°) Or si entre commerçants l'apport de la preuve peut se faire par tous moyens (art. L 110-3 du code de commerce) et si la locataire a pu valablement se contenter de produire l'acte de cession vis à vis de l'usufruitière commerçante, il fallait vis à vis de la non-commerçante opposer un acte ayant date certaine (art. 1328 du code civil)... ce qu'elle ne put faire faute d'avoir fait enregistrer l'acte (ou d'avoir fait en sorte de répondre à l'une des autres conditions posées par l'article 1328). La Cour en déduit que cette carence uniquement vis à vis de  la nue-propriétaire non-commerçante, valide l'exercice du droit de repentir.


OBSERVATIONS :

Dont acte. Les praticiens en prennent bonne note.

Pourtant la question peut se poser de savoir pourquoi l'usufruitier ne peut exercer un droit de repentir sans le concours du nu-propriétaire ?

En effet selon un arrêt de la même 3ème chambre, du 9 décembre 2009, l'usufruitier de murs commerciaux donnés à bail, peut faire délivrer un congé avec refus de renouvellement et offre d'une indemnité d'éviction, seul, sans le concours du nu-propriétaire.

Où est la logique juridique dans le fait de donner le pouvoir à l'usufruitier de "passer un acte" seul et d'exiger ensuite qu'il soit accompagné du nu-propriétaire pour revenir et annuler cet acte ?

Cette logique réside à mon sens dans le fait qu'exercer son droit de repentir c'est accorder le renouvellement du bail (art. L 145-58 du code de commerce)...or selon la jurisprudence le renouvellement du bail commercial ne peut avoir lieu qu'avec le concours du nu-propriétaire.

La boucle paraît bouclée...







samedi 4 août 2012

BAUX PORTANT SUR LES TERRAINS NUS

C'est l'article L. 145-1, I, 2° du code de commerce qui traite de la question de l'application du statut des baux commerciaux aux terrains nus sur lesquels ont été édifiées des constructions légères.

La jurisprudence rappelle que ces baux sur ces terrains pourront se voir appliquer le statut à partir du moment où les constructions auront répondu aux critères de fixité et de solidité et auront été construites avec l'autorisation du bailleur. Ces constructions doivent faire corps avec le sol.

Les jurisprudences suivantes peuvent être utilement consultées :

CA PARIS, Pôle 5, ch 3, 18 janvier 2012, n° 10/04545 Sté Europe 2002 utilitaires c/ Morelli et a.
Cass.civ.3, 1er mars 1995, n° 147 P, SA Val d'Oise Vacances c/ Varnier 
Cass. com. 8 oct. 1962 N° 58-11.689, Sté Meynen et Ricci c/ Desvignes



CENTRES COMMERCIAUX : DPE obligatoire à partir du 1er janvier 2013

Il s'agit d'une possibilité depuis le 1er juillet 2012. Mais l'élaboration d'un diagnostic de performance énergétique est rendue obligatoire à compter du 1er janvier 2013.

Arr. 18 avr. 2012, NOR : DEVL1220586A : JO, 28 avril

jeudi 21 juin 2012

BAUX DEROGATOIRES SUCCESSIFS AVEC CHANGEMENT D'ACTIVITE POUR LE DEUXIEME

Cass. 3e civ., 31 mai 2012 n° 11-15.580, n° 660 P+B
  Raab c/ Oktay Kuru

Article L 145-5 du code de commerce : "Les parties peuvent, lors de l'entrée dans les lieux du preneur, déroger aux dispositions du présent chapitre à la condition que le bail soit conclure pour une durée au plus égale à deux ans.
Si à l'expiration de cette durée, le preneur reste et est laissé en possession, il s'opère un  nouveau bail dont l'effet est réglé par les disposition du présent chapitre.
Il en est de même en cas de renouvellement exprès du bail ou de conclusion, entre les mêmes parties, d'un nouveau bail pour le même local.
Les dispositions des deux alinéas précédents ne sont pas applicables s'il s'agit d'un location à caractère saisonnier."

Pour simplifier on dira que l'alinéa trois de cet article, "sanctionne" par l'application du statut des baux commerciaux le bail dérogatoire qui succède à un autre bail dérogatoire, que ce deuxième bail soit issu d'un renouvellement exprès ou d'un nouveau contrat, dès lors qu'il concerne les mêmes parties et les mêmes locaux.

Mais que se passe-t-il si un deuxième bail dérogatoire est conclu entre les mêmes parties, sur le même local, mais pour une activité totalement différente de la première concernée par le premier bail dérogatoire ?

Dans cette affaire, un premier bail dérogatoire avait donc été conclu pour une activité de "video club, location vente". Puis les mêmes parties, ont conclu un second bail dérogatoire, dans le même local, mais cette fois-ci pour le commerce de vente de fleurs au détail....

Le second bail dérogatoire sur le point d'expirer, le bailleur a donné congé pour l'expiration de ce bail (normal) mais le locataire revendique le statut des baux commerciaux.

Le bailleur fait valoir que la seconde activité était totalement différente de la première et que par conséquent le second bail était nouveau au sens des dispositions de l'article L 145-5. L'idée était intéressante voir séduisante. 

La Cour d'appel n'accepte pas ce raisonnement et la Cour de Cassation rejette le pourvoi du bailleur. Il est fait droit à la demande du preneur. En effet pour revendiquer les statut des baux commerciaux il faut seulement que le second bail soit conclu entre les mêmes parties et qu'il porte sur le même local, ce qui était le cas en l'espèce.

La Cour d'appel comme la Cour de cassation ont utilisé à juste titre le principe selon lequel il ne faut pas ajouter des conditions à la loi, que celle-ci ne contient pas. L'alinéa trois de cet article L 145-5 ne mentionne pas l'activité comme critère supplémentaire pour savoir si le statut s'applique ou non. En d'autre termes pour que le preneur bénéficie du statu il suffisait seulement que le second bail  dérogatoire soit conclu entre les mêmes parties sur le même local sans que soit exigé que la seconde activité soit identique à la première. 

Le seul commentaire qui me paraît intéressant - de mon point de vue bien sûr- et que je ne cesserai de répéter, est que pour bien apprécier la loi il faut appliquer deux principes :

* ne pas ajouter au texte une ou plusieurs conditions d'application qu'il ne contient pas ;
* là où la loi ne distingue pas, il ne faut pas distinguer (ubi lex non distinguit, non distingere debemus et non pas bébé mousse....)



lundi 21 mai 2012

MODIFICATION DU REGIME DU DROIT DE PREEMPTION DES COMMUNES

La loi du 22 mars 2012 précise désormais que le droit de préemption des communes s'exerce sur "les aliénations à titre onéreux". Ainsi sont également concernés, les échanges et les apports en société.

Sont exclus du domaine du droit de préemption les fonds et baux transmis par donations ou par succession.

MOMENT DE LA DELIVRANCE DU CONGE : DES DISPOSITIONS CLARIFIEES

La loi du 22 mars 2012 modifie les deux premiers alinéa de l'article L 145-39 du code de commerce.

Désormais :

* le congé délivré EN COURS DE BAIL (soit, aux échéances contractuellement prévues ou à l'une des échéances triennales) ou bien pour LE TERME CONTRACTUEL, doit être délivré 6 mois à l'avance pour l'une de ces périodes, c'est à dire pour les troisième, sixième ou neuvième anniversaire, et non plus pour le  dernier jour du trimestre qui fait suite à l'un de ces anniversaires;
* le congé délivré AU COURS DE LA TACITE PROLONGATION prend effet le dernier jour du trimestre civil suivant le préavis de 6 mois. La demande quant à elle prend effet le premier jour du trimestre civil qui suit les six mois postérieurs à sa notification.

ADIEU TACITE RECONDUCTION BONJOUR TACITE PROLONGATION

La loi relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives N° 2012-387 du        22 mars 2012, en son article 2, I et II, substitue au vocable de "reconduction" celui de "tacite prolongation".

Sont donc concernés les articles suivants du code de commerce :

- L 145-8 (sur le droit au renouvellement et la durée d'exploitation effective);
- L 145-10 (sur l'époque à laquelle peut être formée la demande de renouvellement);
- L 145-12 (relatif à la date de pris d'effet du nouveau bail en cas de congé);
- L 145-34 (sur la disparition du plafonnement lorsque le bail dure depuis plus de douze ans).

Ceci étant la notion de "reconduction" implique la naissance d'un nouveau contrat, notion que rejetait le statut des baux commerciaux ; le contrat de bail arrivant à son terme et qui ne fait pas l'objet d'une demande ou d'une offre de renouvellement se poursuit aux mêmes clauses et conditions. Monsieur BLATTER l'avait fort bien relevé dans son remarquable ouvrage paru aux éditions du Moniteur; Monsieur BLATTER parlait en effet de tacite prorogation.

dimanche 6 mai 2012

Procédure collective et non renouvellement pour motif grave et légitime

Ainsi que la Cour d'appel de Paris (16ème chambre B) l'a jugé le 23 mars 2006, aucune disposition de la loi sur le redressement ou la liquidation judiciaire n'interdit au bailleur de se prévaloir à l'encontre du preneur en redressement ou en liquidation judiciaire d'un motif grave et légitime, même pour défaut ou retard de paiement des loyers, aux fins de justifier le refus de renouvellement sans indemnité d'éviction.

dimanche 15 avril 2012

SOUS-LOCATION ET BAILLEUR

Les fondamentaux de la sous-location :

1. il n'y a pas de lien contractuel entre le sous-locataire et le bailleur.
2. Le sous-locataire n'a qu'un bailleur : le locataire principal.
3. Tant que le bail se poursuit, le sous-bail reste lui aussi en vigueur.
4. Si le bailleur veut faire cesser la sous-location, il doit s'occuper d'abord de faire résilier la location principale et c'est au locataire ensuite de faire résilier la sous-location.

Cass. 3ème civ. 1er février 2012, n° 10-22.863, 10 -23.818 et 11-10.027 , n° 143 P+B Sté Distribution Casino France c/ Morin et a.

En fait le bailleur a voulu passer outre la résiliation du bail principal et avait assigné locataire et sous-locataire, demandant à ce premier de mettre un terme à la sous-location, sans pour autant demander que soit mis un terme à la location principale (une infraction avait été commise, le locataire n'avait pas appelé le bailleur à concourir à l'acte de sous-location [violation de l'article L 145-31]).

Une Cour d'appel a fait droit à la demande du bailleur estimant qu'il était effectivement sans droit ni titre nivs à vis du bailleur.

La Cour de Cassation a censuré cet arrêt sur les fondement des article 1134 et 1165 du code civil et L 143-31 du Code de commerce. Pour Elle, le bail principal tant qu'il n'est pas résilié continue de produire ses effets et notamment il continue de servir de support à l'acte de sous-location.

vendredi 16 mars 2012

La procédure en acquisition de la clause résolutoire et les créanciers inscrits à prendre en compte pour la leur dénoncer


ACQUISITION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE - DEMANDE RECONVENTIONNELLE OBLIGATION DE DENONCER LA PROCEDURE AUX CREANCIERS INSCRITS - INSCRIPTION POSTERIEURE A L'EXPIRATION DU DELAI D'UN MOIS PREVUE AU COMMANDEMENT - VALIDITE : OUI - OBLIGATION DE DENONCIATION : OUI.

Arrêt du 22 mars 2006
N° 385 FS-P+B+R

Article L 143-2 du code de commerce : « Le propriétaire qui poursuit la résiliation du bail de l'immeuble dans lequel s'exploite un fonds de commerce grevé d'inscriptions doit notifier sa demande aux créanciers antérieurement inscrits, au domicile élu par eux dans leurs inscriptions.
Le jugement ne peut intervenir qu 'après un mois écoulé depuis la notification. La résiliation amiable du bail ne devient définitive qu 'un mois après la notification qui en a été faite aux créanciers inscrits, aux domiciles élus. »

Dans cette affaire, par acte du 3 février 1995 la bailleresse fait délivrer à sa locataire un commandement de payer un arriéré de loyer. Suite à l'opposition de sa locataire, la bailleresse obtient reconventionnellement des premiers juges et de la Cour d'appel l'acquisition de la clause résolutoire et son expulsion.

Or un établissement financier détenait deux nantissements inscrits sur le fonds de la locataire. Non attrait dans la procédure d'expulsion il assigne la bailleresse en dommages-intérêts « lui reprochant d'avoir commis une faute en s'abstenant de lui notifier la procédure de résiliation judiciaire du bail. »

La cour d'appel déboute l'établissement financier, retenant que la résiliation est devenue effective à l'expiration du délai d'un mois suivant la délivrance du commandement et qu'en ayant inscrit les nantissements postérieurement à cette expiration, l'établissement de crédit n'avait pas acquis la qualité de créancier au sens de l'article L 143-2 du code de commerce.

La cour de cassation n'admet pas ce raisonnement : «Qu'en statuant ainsi alors que le bailleur qui entend poursuivre en justice la résiliation du bail par acquisition de la clause résolutoire doit notifier sa demande à tous les créanciers inscrits à la date de celle-ci, la cour d'appel a violé » l'article L 143-2 du code susvisé.


OBSERVATIONS :

C'est l'assignation, c'est-à-dire la demande, qui est la frontière entre les créanciers inscrits qui doivent être pris en compte et ceux qui ne peuvent plus l'être ; ça n'est pas le commandement.

Celui-ci n'est pas à proprement parler une demande de résiliation. En effet la loi est plus générale, elle ne fait pas seulement référence au propriétaire qui poursuit l'acquisition de la clause résolutoire et qui est obligé de délivrer une commandement.

Cet arrêt est le corolaire de deux autres : Cour de Paris, du 2 février 1934 (sem. jur. 1934, 938) Cour de Bordeaux du 6 février 1941 (S. 1941 T), selon lesquels tous les créanciers inscrits postérieurement à l'action en résiliation judiciaire ne peuvent opposer le défaut de notification.

Le redressement judiciaire n'exclut pas le paiement par compensation


DETTE NEE DE REPARATIONS NECESSAIRES A LA CHARGE DU BAILLEUR- DETTE DE LOYER - REDRESSEMENT JUDICIAIRE DU LOCATAIRE - PAIEMENT PAR COMPENSATION : OUI -

CIV 3. 13 février 2002 N° 246


RAPPEL DES TEXTES:

Article 1289 du Code civil: « Lorsque deux personnes se trouvent débitrices l'une envers l'autre, il s'opère entre elles une compensation qui éteint les deux dettes (...) ».

Article L 621-24 § 1er du Code de commerce : « Le jugement ouvrant la procédure [de redressement judiciaire] emporte de plein droit, interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d'ouverture. Cette interdiction ne fait pas obstacle au paiement par compensation de créances connexes ».

Dans cette affaire les bailleurs, en l'absence de stipulation expresse contraire du bail, sont à la suite d'un rapport d'expertise judiciaire, considérés comme contraints de remettre en état les lieux loués. Cette remise en état est chiffrée par l'Expert judiciaire. Bien entendu ne sont pas concernées les réparations locatives.

Pendant ce temps, la société locataire qui a contracté des dettes et notamment des dettes de loyer est mise en redressement judiciaire et un plan de continuation est arrêté par un Jugement.
La preneuse veut que ses bailleurs fasse l'avance du montant des travaux de remise en état.

Les bailleurs invoquent la compensation entre le coût des travaux à leur charge et le montant des loyers dus antérieurement au jugement d'ouverture du redressement judiciaire.

*      La COUR d'APPEL de RIOM rejette la prétention des bailleurs, la déclarant sans objet.
*       Mais Elle est censurée par la COUR de CASSATION qui rappelle les dispositions de l'article L 621-24 § 1cr du Code de commerce.


Sur les travaux incombant au bailleur, la COUR SUPREME rappelle incidemment mais clairement qu'il faut s'attacher à examiner les stipulations expresses du bail pour déterminer leur existence et leur étendue.

Il est bon de se souvenir qu'en l'absence de stipulations du bail sur les grosses réparations, l'article 1719 du Code civil. qui dispose notamment que le bailleur est tenu « d'entretenir » la chose louée « en état de servir à l'usage pour lequel elle a été louée », s'applique.

mardi 13 mars 2012

Circonstances et pommes de terres....nouvelles


ORDONNANCE DE REFERE - RETRACTATION CIRCONSTANCES NOUVELLES - DEFINITION -
CIV 3, 16 décembre 2003, N° 1437


« L'ordonnance de référé n'a pas, au principal, l'autorité de la chose jugée.
Elle ne peut être modifiée ou rapportée en référé qu'en cas de circonstances nouvelles. »

Dans cette affaire, une locataire assigne sa bailleresse en référé, aux fins de voir rapportée une ordonnance (rendue le 5 juillet 2000), ayant constaté la résiliation du bail commercial pour le non-paiement de loyers dans le mois d'un commandement.
La Cour d'appel de CAEN rétracte l'ordonnance et déboute la bailleresse de sa demande en paiement de loyers, en retenant qu'au 30 mai 2000 la locataire était à jour de ses loyers et que n'ayant pas fait état de cette situation à l'audience du 14 juin 2000 devant le Juge des référés (initialement saisi), elle était autorisée à en faire état pour la première fois à l'appui de sa demande en rétractation, cette circonstance devant donc être qualifiée de nouvelle.
La Cour de Cassation interprète strictement les dispositions du Nouveau Code de Procédure Civile et censure la Cour d'Appel dans les termes suivants :
«(...) ne constituent pas une circonstance nouvelle autorisant la rétractation d'une ordonnance de référé des faits antérieurs à la date de l'audience devant le juge des référés qui a rendu l'ordonnance et connus de celui qui sollicite la rétractation ».
OBSERVATIONS: la juridiction des référés est à manier avec précaution. Que l'on se souvienne également qu'une ordonnance de référé a l'autorité de la chose jugée et qu'ayant déclarée acquise la clause résolutoire elle ne peut plus être remise en cause par le juge du fond, dès lors que cette ordonnance n'est plus susceptible d'appel.