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jeudi 14 mars 2013

LOYER BINAIRE: attention au montant du loyer minimum garanti


Arrêt de la 3ème Chambre civile du 5 mars 2013
N° 294 F-D
Pourvoi n° P 11-28.461

LOYER BINAIRE - REVISION - MODALITES - VOLONTE DES PARTIES


DANS CETTE AFFAIRE une société preneuse accepte en toute connaissance de cause, après avoir négocié longuement, de signer un bail aux termes duquel elle est tenue de régler un loyer variable, déterminé année par année, correspondant à 7 % des son chiffres d'affaires HT et HC. Il s'agit d'une clause dite , "clause-recette".

Elle accepte également, de payer un loyer minimum garanti, soumis à une clause d'indexation (clause d'échelle mobile) uniquement à la hausse, automatique et annuelle, en fonction de la variation de l'indice INSEE.

Pour la locataire, le problème devient crucial à partir du moment où elle s'aperçoit qu'elle est toujours obligée de payer le loyer minimum garanti (le loyer dépendant des recettes étant quant à lui toujours inférieur à ce loyer minimum) et qu'elle constate que cet écart est trop grand puisqu'effectivement elle indique dans son pourvoi qu'il faudrait pour que la clause-recette s'applique, qu'elle ait un chiffre d'affaires trois fois plus important (elle prend une année en exemple).

En d'autres termes la locataire estime que le loyer minimum garanti est beaucoup trop élevé, trop éloigné de la réalité de ses recettes. Elle aurait souhaité voir appliquer les dispositions de l'article L 145-9 du code de commerce qui visent à mettre le loyer en adéquation avec la valeur locative et donc éviter les effets d'une variation excessive de l'indice retenu dans la clause d'échelle mobile (voir mon article précédent).

Elle tente donc de faire annuler cette clause décrivant le loyer binaire en invoquant la fraude à l'article              L 145-9, c'est à dire le fait que la clause attaquée aurait eu pour but unique d'empêcher l'application desdites dispositions de l'article L 145-9.

La COUR DE CASSATION se range au côté de la COUR d'APPEL qui avait rejeté les prétentions de la locataire en relevant et décidant que :

- les parties s'étaient librement accordées sur chacune des composantes du loyer comportant une partie fixe et une partie variable;
- que les composantes du loyer formaient un tout indivisible;
- les règles fixant la révision de ce loyer binaire étaient purement régies par le contrat et échappaient donc aux modes de révision prévus par le statut des baux commerciaux donc à l'article L 145-9 du code de commerce notamment.

La Cour d'appel précisait même : "qu'enfin il n'est rapporté aucune intention malicieuse imputable aux bailleresses, de telle sorte que le contrat qui fait la loi des parties à laquelle elles ont entendu  se soumettre, ne peut être écarté".

Eric DESLANDES 
Avocat -PARIS




mardi 14 février 2012

Loyer binaire, fixation du loyer du bail renouvelé, pouvoir du juge, volonté des parties


RENOUVELLEMENT DU BAIL - FIXATION DU LOYER - POUVOIR DU JUGE VOLONTE DES PARTIES - LOYER BINAIRE [Civ. 3è 7 mars 2001]

de Eric DESLANDES Avocat au Barreau de Paris TEL 01 40 72 690 45, deslandesavocat@orange.fr

RAPPELS

 Selon les dispositions de l'article 35 du décret du 30 septembre 1953 (aujourd'hui L 145-15 du code de commerce) , celles des articles 23 à 23-9 n'ont pas de caractère d'ordre public. En d'autres termes, les parties peuvent convenir librement du mode de fixation du loyer, d'où la possibilité de fixer un loyer comportant une partie fixe et une partie variant en fonction du chiffre d'affaires du preneur.

2° L'article 23 du même décret (L 145-33 du code de commerce) définit les éléments qui servent à établir la valeur locative.

3° En application de l'article 1134 du Code civil, le contrat fait la Loi des parties.



DANS CETTE AFFAIRE, le loyer convenu à l'origine entre une société preneuse et une société bailleresse est composé d'un loyer fixe annuel indexé et d'un complément variable constitué par un pourcentage du chiffres d'affaires de la preneuse, réalisé dans les lieux. Le bail d'origine, déjà renouvelé, est conclu pour une durée de 12 années.
Au moment du renouvellement, la bailleresse prétend que le loyer fixe annuel indexé (ce minimum garanti) doit correspondre à la valeur locative en application de l'article 23 sus-visé.

LA COUR D'APPEL rejette les prétentions de la bailleresse en retenant NOTAMMENT que :

- les parties ont le pouvoir de déterminer conventionnellement les modalités selon lesquelles le loyer du bail renouvelé sera fixé (cf «RAPPELS 1°, application de l'article 35 du décret),
- la convention a valeur de Loi entre les parties,
- la clause litigieuse est claire et précise et la volonté d'origine des parties a été réitérée plusieurs fois sans qu'il ait été fait référence à la valeur locative,
- dans ces conditions le Juge n'a pas le pouvoir de modifier la volonté des parties et de dénaturer le contrat.

LA COUR DE CASSATION accueille la motivation de la COUR D'APPEL et rejette le pourvoi de la bailleresse : « La Cour d'Appel a retenu à bon droit que par les stipulations du bail relatives à la fixation du loyer les parties avaient entendu déroger aux dispositions du décret du 30 septembre 1953... ».


COMMENTAIRE

La volonté des parties en matière de fixation du loyer d'origine est libre.

Dès lors qu'il en résulte que le loyer contient une partie fixe et une partie variable, sans aucune référence à la valeur locative, ce qui d'ailleurs serait incompatible comme le relève à juste titre la Cour d'appel in fine (valeur locative et chiffre d'affaires résultant de deux visions économiques très différentes) cette commune volonté des parties - si elle n'a pas changé en cours de route de manière non équivoque - continue de s'imposer à tous au moment du renouvellement du bail.

Ainsi en l'espèce il importait peu que le bail ait duré plus de 12 années et que le statut des baux commerciaux prévoit en ce cas le déplafonnement automatique du loyer lors de son renouvellement.