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mardi 14 novembre 2023

La clause résolutoire définitivement acquise et le caractère inopérant de la mauvaise foi lors de sa mise en oeuvre...

 Cass. 3ème civ., 26 octobre 2023 n° 22-16216 B


C. com. L. 145-41 :" Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge."

Dans cette affaire le juge des référés octroie des délais de paiement de 24 mois à un locataire et suspend les effets de la clause résolutoire dans des termes tout à fait classiques. Son ordonnance devient évidemment définitive, le locataire ayant eu gain de cause.

Tout le monde connait les sanctions qui s'attachent au non respect des délais accordés.

Le locataire ne respecte pas les délais, et il lui reste donc un solde locatif à payer. Il est expulsé sur le fondement de ces manquements dans l'exécution des prescriptions de l'ordonnance.

Le locataire attaque l'expulsion et se plaint auprès de la justice qu'au jour de son expulsion il ne devait plus qu'une somme minime au regard de sa dette de départ qui était élevée, et que de plus il avait, à un moment donné, payé plus rapidement que prévu une grande partie de sa dette.

Il en conclut que le bailleur l'a expulsé à tort en faisant jouer la clause résolutoire de mauvaise foi.

La Cour d'appel lui donne raison, mais son arrêt est réformé par la Cour de Cassation.

Au regard de l'article 145-41 du code de commerce il n'y a, si l'ordonnance de référé définitive n'a pas été respectée à la lettre par le locataire, plus de possibilité pour le locataire d'invoquer la mauvaise foi du bailleur. Le bailleur peut exécuter sans crainte ladite ordonnance et procéder à l'expulsion du locataire, devenu occupant sans droit ni titre.

Observations: bien évidemment tout cela sous réserve de la réalité de la non-exécution complète de l'ordonnance. Cette décision ne se comprends que si l'on retient que le locataire avait obtenu ses délais de paiement qu'il avait demandés, sans soulever la mauvaise foi existante lors de la délivrance du commandement. On peut y voir une renonciation à invoquer la mauvaise foi. Le locataire se trouve dans la même position que le bailleur qui, connaissant l'infraction du locataire renouvelle le bail : il ne peut plus invoquer cette infraction. Là le locataire demande des délais en premier lieu, il ne peut plus se prévaloir d'un vice de fond du commandement en ayant implicitement renoncé à l'invoquer, "vice de fond" que constitue la mauvaise foi. On suppose qu'il connaissait ou était sensé connaître les raisons de la mauvaise foi.

Il n'y a donc place pour la mauvaise foi du bailleur en matière de clause résolutoire, qu'avant toute demande de délais et de suspension des effets de la clause résolutoire de la part du locataire.


vendredi 29 juillet 2022

La fixation de la provision de loyer durant la procédure en fixation du prix du bail renouvelé devant le juge des loyers : à argumenter de part et d'autre !

 Cass. 3ème civ., 11 mai 2022 

n° 20-21.651 (joint avec 689 et 652)

 

R.145-23 du code de commerce : "Les contestations relatives à la fixation du prix du bail révisé ou renouvelé sont portées, quel que soit le montant du loyer, devant le président du tribunal judiciaire ou le juge qui le remplace. Il est statué sur mémoire.

Les autres contestations sont portées devant le tribunal judiciaire qui peut, accessoirement, se prononcer sur les demandes mentionnées à l'alinéa précédent.

La juridiction territorialement compétente est celle du lieu de la situation de l'immeuble".

NB Cet arrêt a ordonné la jonction de trois pourvois entre les mêmes parties, il n'est question ici que d'un des trois pourvois tranchés par cet arrêt.

Pour bien comprendre l'intérêt de la question il faut juste préciser quelques faits contenus dans l'arrêt d'appel (PAU 09/09/2020, n° 19/00730).

DANS CETTE AFFAIRE, la locataire saisit le juge des loyers pour faire fixer le prix du loyer du bail dont le renouvellement a été accordé par la bailleresse.

Le juge des loyers ordonne une expertise et le temps que la solution soit apportée, fixe un loyer provisionnel. Le montant de ce dernier est celui que la bailleresse avait demandé dans son mémoire.

L'expert rend son rapport et le montant du loyer qu'il préconise est inférieur au montant du loyer provisionnel versé durant l'expertise par la locataire.

Je juge des loyers suit l'expert sur le montant du loyer, mais refuse de faire droit à la demande de condamnation formulée par la locataire  en remboursement du trop-perçu de loyers par la bailleresse, estimant que cette demande dépasse ses pouvoirs.

La cour d'appel se range de l'avis du premier juge et est elle-même suivie par la Cour de cassation: une demande de condamnation excède la compétence du juge des loyers commerciaux telle que réglementée par l'article R.145-23 du code de commerce.

 

mardi 11 mai 2021

L'exception d'inexécution justifiant le non paiement des loyers et bloquant l'acquisition de la clause résolutoire; rappel du principe selon lequel l'obligation de délivrance s'applique pendant la durée du contrat et pas seulement lors de sa conclusion.

 Cour de cassation 3ème chambre civile

10 septembre 2020 pourvoi n° R 18-21.890

 

Texte de loi visé par la Cour de cassation : article 1719 du code civil

Dans cette affaire, le bailleur délivre un commandement de payer des loyers, en visant la clause résolutoire.

Le locataire lui oppose l'exception d'inexécution et fait valoir que selon la règlementation relative à l'amiante, il y a trop de fibres d'amiante dans l'air,  ce qui empêchait le commandement de produire son effet. Il estime que les lieux sont inexploitables.

Le locataire avait dû déménagé, c'est pour cela également qu'il demandait des dommages-intérêts. 

Le Tribunal lui a donné raison. 

La cour d'appel a infirmé le jugement et expliqué que les nouvelles normes concernant l'amiante sont postérieures au contrat de bail et que le locataire ne pouvait les invoquer.

La Cour de Cassation a censuré la cour d'appel : l'obligation de délivrer un local pouvant être exploité conformément à sa destination est continue, et ne s'exécute pas seulement au moment de la signature du contrat. 

Observations : le principe de l'existence de l'obligation de délivrance, pendant toute la durée du contrat était pourtant bien établi !

Ce qu'il faut noter c'est que tout comme l'absence de bonne foi au moment de la délivrance du commandement, l'exception d'inexécution paralyse le commandement de payer, à partir du moment où elle est fondée sur une impossibilité totale d'exploiter les lieux à cause du bailleur, même si parfois la jurisprudence n'est pas claire et qu'une impossibilité partielle semble prise en compte. En l'espèce l'impossibilité d'exploiter était établie le locataire ayant été obligé de quitter les lieux après la mesure du nombre de fibres d'amiante dans l'air. Il ne pouvait en être autrement,  sauf à considérer que l'obligation de délivrance ne devait exister que ponctuellement lors de la signature du contrat.

Il faudra toujours que le locataire soit prudent quant à l'établissement et la conservation de la preuve de l'inexécution par le bailleur. Bien évidemment, des réclamations, des sommations, des constats d'huissier, des témoignages seront indispensables pour permettre au juge de caractériser la violation de l'obligation de délivrance.

samedi 18 avril 2020

L'immatriculation et la revendication de l'application du statut : article précédent complété


L’intérêt de l’immatriculation

Elle est pour le preneur, la clef lui permettant de demander le bénéfice du statut lorsqu'il est titulaire d'un bail commercial, ou de faire admettre la requalification du contrat pour obtenir le bénéfice du statut des baux commerciaux.

Dès lors, le renouvellement du bail, pierre angulaire de l’édifice statutaire, est soumis à cette immatriculation, qu’il soit demandé ou offert (même plusieurs années à l’avance)[1].

Mais d’une manière générale, le locataire doit être immatriculé, dès lors qu’il sollicite l’application du statut et pas exclusivement le renouvellement de son bail[2].


Qui doit être immatriculé ?

-          Le locataire commerçant ;

-          L’indivisaire qui exploite le fonds ;

-          Les époux coexploitants ;

-          Le nu-propriétaire même non-exploitant[3] ;

-          L’héritier d’un locataire qui n’avait pas l’obligation de s’immatriculer ;

-          L’exploitant d’un établissement secondaire[4] même si son établissement principal est immatriculé. Attention cependant à ce qu’un local accessoire (qui n’est pas un établissement secondaire et comme tel n’a pas à être immatriculé) ne devienne pas « en cours de route » un établissement secondaire (en venant à recevoir de la clientèle) (cf. Traité des baux commerciaux de M. J-P Blatter Ed. le Moniteur).


Quand le locataire doit-il être immatriculé ?

Dans mon précédent article cette partie était intitulé : le locataire doit-il être immatriculé à tout moment et effectivement cette question ne se posait que lorsqu'un bail commercial était conclu dès le départ, sans aucune autre problématique. 
Mais au cours de mes recherches, effectivement, me sont apparues des questions connexes m'obligeant à élargir ma question d'origine.

Il y a en fait deux cas de figure à envisager : soit le bail d'origine est un bail commercial, et ce que j'ai écrit précédemment, s'applique à cette hypothèse (I.), soit le bail d'origine n'est pas un bail commercial (II.).


I.- Hypothèse de la conclusion d'un bail commercial, dès l'origine.
L'immatriculation dès l'origine du locataire n'est pas obligatoire.

Il se déduit de l’exigence l’égale et jurisprudentielle que c’est donc à la date où demande de renouvellement[5] et congé avec offre de renouvellement sont régularisés que l’immatriculation est fondamentale[6].

Par ailleurs, durant le temps où le fonds est le cas échéant en location-gérance, le l’unique locataire principal, ou les membres de l’indivision locataire principale, n’ont pas à s’immatriculer pour bénéficier du droit au renouvellement (Code. Com. L.145-1 II.). Attention donc pour le ou les locataire(s), à ne pas faire cesser la location gérance, sans que le locataire principal ou l’un des membres de l’indivision ne s’immatricule au jour de la cessation de la location-gérance et exploite les lieux effectivement, ou bien sans que le ou les héritiers ai(en)t demandé, le maintien de l’immatriculation du de cujus (L.145-1 III § 2).

En cas de copreneurs ou de locataires indivis, seul doit être immatriculé, l’exploitant du fonds, les autres n’ont pas à l’être (L. 145-1 III § 1er.), sauf en cas de démembrement entre un usufruitier et un nu-propriétaire : même si le nu-propriétaire n’exploite pas le fonds, il doit être immatriculé sous la dénomination propriétaire non exploitant (cf. supra).

Dans l’hypothèse visée par l’article L. 145-1 III § 2, savoir le maintien de l’immatriculation du prédécédé, il convient de se reporter en pratique à l’article R. 123-46 du code de commerce qui prévoit que le décès de la personne immatriculée doit faire l’objet d’une déclaration rectificative du RCS « avec possibilité de déclarer le maintien provisoire, pendant un délai maximum d’un an, de l’immatriculation. »

Quelques cas où l’absence d’immatriculation est admise par la jurisprudence

Le cédant d’un fonds peut ne pas être immatriculé au moment de la cession, ce que le bailleur ne peut lui reprocher[7]

Le bail est expiré, le locataire se fait radier et se maintient dans les lieux en attendant la fixation en justice de l’indemnité d’éviction…le bailleur ne peut lui opposer la déchéance du droit à l’indemnité d’éviction et donc le bénéfice du statut[8].

De même, le bail expiré pour cause de renouvellement et une instance étant en cours pour fixer le nouveau loyer, le bailleur ne peut exciper d’un défaut d’immatriculation postérieur à l’expiration du bail précédent[9].


Qu’entraîne le défaut d’immatriculation ?

Une déchéance du droit au renouvellement et à l’indemnité d’éviction. Plus généralement l’impossibilité pour le locataire de se prévaloir d’un seul « avantage » du statut.


Comment le bailleur peut-il mettre en œuvre cette déchéance ?

Il doit faire délivrer un congé motivé portant refus de renouvellement et de paiement de l’indemnité d’éviction.

S’agissant du défaut d’immatriculation, le congé n’a pas à être précédé d’une mise en demeure enjoignant au locataire à mettre fin à l’infraction.

Le bailleur peut dénier le droit au renouvellement tant qu’une décision définitive sur l’indemnité d’éviction n’a pas été rendue[10]


Le ou les locataires peuvent-ils remédier à cette déchéance ?

Ils peuvent l’éviter ainsi qu’il l’a été dit plus haut, mais ne peuvent y remédier lorsque la non-immatriculation « est acquise ».


Le ou les locataires non-exploitants pourraient-ils avancer, qu’après avoir fait cesser la location-gérance, des obstacles matériels se sont dressés les empêchant de remettre les lieux en location-gérance ?

Selon la jurisprudence, il semble que non.
Selon moi rien ne les empêche en effet de s’immatriculer (tous ou l’un d’entre eux selon la situation de l’indivision) pour palier à l’absence de locataire gérant, quitte ensuite à arguer de difficultés pour exercer dans les lieux.


II. Le bail d'origine n'est pas un bail commercial.

 
Dans cette hypothèse, le locataire va demander le bénéfice du statut des baux commerciaux en passant par la requalification du bail d'origine.

Si le bail d'origine est un bail dérogatoire qui se transforme en un bail commercial par le seul effet de l'article L. 145-5, le locataire étant obligé de demander au juge de valider cette transformation parce que le bailleur la lui dénie, son immatriculation eu RCS ou au répertoire des métiers n'est pas obligatoire, tout simplement parce que ce serait ajouter à la loi que d'imposer une telle condition que la loi ne contient pas :  c'est le sens du contenu de l'arrêt de la 3ème chambre civile de la Cour de cassation du 25 octobre 2018 n° 17-26126 P+B+I.

Par contre si le bail d'origine est autre, et que le statut est revendiqué, alors l'immatriculation est obligatoire au moment où ledit statut est revendiqué. C'est le sens de deux décisions toujours de la 3ème chambre civile : 22 janvier 2014 n°  12-26179 et 18 juin 2014 n° 12-20714.


En conclusion, il semble que la revendication quelle qu'en soit le moment, du bénéfice du statut des baux commerciaux, soit le générateur de l'exigence de l'immatriculation au RCS ou au répertoire des métiers, avec cette nuance apportée par le contenu de l'article L145-5 concernant le passage du bail dérogatoire en bail commercial dont on remarquera qu'il est un effet de la loi et qu'il n'est donc pas revendiqué.




 La jurisprudence est disponible sur simple demande.
Eric DESLANDES

Avocat au Barreau de Paris

Prestation de serment du 
16 janvier 1987

8 rue des Saints Pères

75007 PARIS

Tél. 06 83 89 91 40

       01 40 72 60 45

deslandesavocat@orange.fr


[1] C. Cass. 3ème civ., 1er oct. 1997 n° 95-15842
[2] C. Cass. 3ème civ., 7 juillet 2015 n° 13-23671
[3] C. Cass. 3ème civ., 5 mars 2008 n°05-20200
[4] C. Cass. 3ème civ., 7 nov. 2001 n° 00-12453
[5] C. Cass. 3ème civ., 25 oct. 1983 n° 81-14926
[6] C. Cass. 3ème civ., 1er juin 2010 n° 08-21795
[7] C. Cass. 3ème civ., 1er fév. 1995 n° 93-12537
[8] C. Cass. 3ème civ., 29 sept. 2004 n° 03-13997
[9] C. Cass. 3ème civ., 18 mai 2005 n° 04-11985
[10] C. Cass. 3ème civ., 7 sept. 2017 n° 16-15012

mercredi 1 mai 2019

La déchéance du droit au renouvellement peut aussi naître de la nullité du contrat de location-gérance.

Cass. 3e civ., 22 mars 2018,
 n° 17-15.830, F-P+B

Textes du code de commerce : 
L. 144-3 (modifié par ordonnance n° 2004-274 du 25 mars 2004):

"Les personnes physiques ou morales qui concèdent une location-gérance doivent avoir exploité pendant deux années au moins le fonds ou l'établissement artisanal mis en gérance".  
L. 144-10

"Tout contrat de location gérance ou toute autre convention comportant des clauses analogues, consenti par le propriétaire ou l'exploitant d'un fonds de commerce ne remplissant pas les conditions  prévues aux articles ci-dessus, est nul. Toutefois les contractants ne peuvent invoquer cette nullité à l'encontre des tiers.
La nullité prévue à l'alinéa précédent entraîne à l'égard des contractants la déchéance des droits qu'ils pouvaient éventuellement tenir des dispositions du chapitre V du présent titre réglant les rapports entre bailleurs et locataires en ce qui concerne le renouvellement des baux à loyer d'immeubles ou de locaux à usage commercial, industriel ou artisanal."

Dans cette affaire...une personne, physique en l’occurrence,  est titulaire d'un fonds de commerce  depuis moins de deux ans et le donne alors en location-gérance.

La bailleresse, c'est à dire, la propriétaire des murs, fait délivrer à sa locataire, deux commandements dans portant refus du droit à renouvellement et refus de payer une indemnité d'éviction, invoquant l'absence d'exploitation du fonds de commerce pendant les deux ans précédent la mise ne location gérance.

La locataire assigne alors en contestation des congés mais le tribunal la déboute de ses demandes et lui refuse dès lors toute indemnité d'éviction.

La Cour d'appel va infirmer ce jugement et décider que les motifs des congés n'étaient pas justifiés et que la bailleresse était tenu au paiement d'une indemnité d'éviction.
Ladite Cour d'appel motive sa décision en retenant que même si la locataire d'origine n'a pas exploité le fonds durant deux ans, cette faute n'a de conséquence qu'entre les parties au contrat de location-gérance et n'entraîne pas ipso facto la nullité dudit contrat, CETTE MÊME FAUTE ne constituant pas dès lors "un motif grave et légitime privatif d'une indemnité d'éviction dès lors que la bailleresse ne rapporte pas la preuve du préjudice qu'elle lui cause sur le fondement de l'article 1382 ancien du code civil." 

La Cour suprême ne pouvait que sanctionner une telle erreur dans l'application des textes pourtant clairs, rappelant au passage que les règles de validité du contrat de location-gérance et notamment les conditions tenant au  loueur et la sanction qui les accompagne "n'ont pas pour finalité la protection des intérêts particuliers des parties".

Si les deux ans d'exploitation par le locataire d'origine c'est à dire le propriétaire du fonds (ou de l'établissement artisanal) ne sont pas respectés, les sanctions de l'article L.144-10 du code de commerce s'appliquent :
* le contrat de location gérance est nul;
* le locataire (propriétaire du fonds de commerce ou du fonds artisanal) est déchu des droits qu'il tire du statut des baux commerciaux et notamment du droit au renouvellement de son bail.

La locataire aurait du demander (art. L.144-4 du code de com.) la réduction du délai légal au Président du TGI, par voie de requête, en prouvant qu'elle se trouvait dans l'impossibilité d'exploiter son fonds personnellement ou par l'intermédiaire de proposés, et attendre une décision positive AVANT de conclure son contrat de location-gérance.

dimanche 19 février 2017

Le danger de la sous-location totale

CA PARIS, pôle 5, ch 3, 2 décembre 2016
RG n° 15/12231



Rappel du texte appliqué :
Article L145-8 du code de commerce
 
Le droit au renouvellement du bail ne peut être invoqué que par le propriétaire du fonds qui est exploité dans les lieux.
Le fonds transformé, le cas échéant, dans les conditions prévues à la section 8 du présent chapitre, doit, sauf motifs légitimes, avoir fait l'objet d'une exploitation effective au cours des trois années qui ont précédé la date d'expiration du bail ou de sa prolongation telle qu'elle est prévue à l'article L. 145-9, cette dernière date étant soit la date pour laquelle le congé a été donné, soit, si une demande de renouvellement a été faite, le premier jour du trimestre civil qui suit cette demande.

Solution

Dans cette affaire la cour d'appel fait droit à la demande de la bailleresse de dénégation du droit au renouvellement sollicité par la locataire qui n'a fait que sous-louer les lieux. Elle précise bien les éléments de preuve apportés par la bailleresse. On pourra retenir qu'elle se fonde, notamment, sur un constat d'huissier.

mercredi 1 février 2017

Résiliation du bail par un seul locataire en cas de co-preneurs....attention.....



Civ 3 12 janvier 2017

Pourvoi F 15-23.686 Arrêt 47 - FD


Dans cette affaire, un bail est accordé à une société et à une personne physique en l’occurrence, au gérant de la société.

A la signature du bail, trois personnes se portent cautions solidaires de tout somme que pourraient devoir les locataires à la bailleresse.

Six mois avant la fin de la première période triennale, seule la société locataire, sous la plume de son gérant résilie le bail et rend les clefs. Puis la société est mise en liquidation et le liquidateur résilie le bail, toujours avant l'expiration de la période triennale.

Les cautions sont assignées par la bailleresse pour régler un solde locatif et une clause pénale, arrêté au jour de l'expiration de la période triennale.

Les cautions estiment :

- que leur dette doit être arrêtée au jour où le liquidateur a résilié le bail, ce dernier ayant pris fin à cette date;
- que la bailleresse ne pouvait ignorer que "les co-preneurs" avaient l'intention de libérer les lieux, puisque le gérant avait écrit.....
- qu'elles n'ont donc pas à payer les loyers jusqu'à l'expiration de la période triennale.

La cour suprême au visa des articles 1134 et 1208 du code civil casse et annule l'arrêt de la cour d'appel qui avait accueilli l'argumentation des cautions, dans les termes suivants:

" Qu'en statuant ainsi, alors que la seule volonté d'un locataire de résilier le bail ne peut suffire en l'absence de stipulation conventionnelle le prévoyant, à mettre fin au contrat à l'égard des autres co-preneurs la cour d'appel a violé les textes sus-visés".


mardi 9 juillet 2013

IMMATRICULATION AU RCS ET DROIT AU RENOUVELLEMENT

Sous-location autorisée conventionnellement. Locataire principal non immatriculé au moment du renouvellement. Sous-location dispensant le locataire principal d'être immatriculé (NON). Locataire principal déchu du statut (OUI). Perte du droit à indemnité d'éviction (OUI).

Cour de Cassation 3ème civ. 3 juillet 2013
pourvoi n° Z 12-21.966

Les enseignements de cet arrêt sont les suivants :
  1. - le bailleur peut revenir sur son offre de renouvellement s'il découvre postérieurement une infraction
  2. - en l'espèce en l'absence d'immatriculation au moment du renouvellement le locataire principal perd son droit à renouvellement ainsi qu'au paiement d'une indemnité d'éviction
  3. - la présence d'un sous-locataire ne peut lui servir de prétexte pour ne pas avoir été immatriculé

A bientôt.

Cordialement


Eric DESLANDES, Avocat PARIS

jeudi 14 mars 2013

LOYER BINAIRE: attention au montant du loyer minimum garanti


Arrêt de la 3ème Chambre civile du 5 mars 2013
N° 294 F-D
Pourvoi n° P 11-28.461

LOYER BINAIRE - REVISION - MODALITES - VOLONTE DES PARTIES


DANS CETTE AFFAIRE une société preneuse accepte en toute connaissance de cause, après avoir négocié longuement, de signer un bail aux termes duquel elle est tenue de régler un loyer variable, déterminé année par année, correspondant à 7 % des son chiffres d'affaires HT et HC. Il s'agit d'une clause dite , "clause-recette".

Elle accepte également, de payer un loyer minimum garanti, soumis à une clause d'indexation (clause d'échelle mobile) uniquement à la hausse, automatique et annuelle, en fonction de la variation de l'indice INSEE.

Pour la locataire, le problème devient crucial à partir du moment où elle s'aperçoit qu'elle est toujours obligée de payer le loyer minimum garanti (le loyer dépendant des recettes étant quant à lui toujours inférieur à ce loyer minimum) et qu'elle constate que cet écart est trop grand puisqu'effectivement elle indique dans son pourvoi qu'il faudrait pour que la clause-recette s'applique, qu'elle ait un chiffre d'affaires trois fois plus important (elle prend une année en exemple).

En d'autres termes la locataire estime que le loyer minimum garanti est beaucoup trop élevé, trop éloigné de la réalité de ses recettes. Elle aurait souhaité voir appliquer les dispositions de l'article L 145-9 du code de commerce qui visent à mettre le loyer en adéquation avec la valeur locative et donc éviter les effets d'une variation excessive de l'indice retenu dans la clause d'échelle mobile (voir mon article précédent).

Elle tente donc de faire annuler cette clause décrivant le loyer binaire en invoquant la fraude à l'article              L 145-9, c'est à dire le fait que la clause attaquée aurait eu pour but unique d'empêcher l'application desdites dispositions de l'article L 145-9.

La COUR DE CASSATION se range au côté de la COUR d'APPEL qui avait rejeté les prétentions de la locataire en relevant et décidant que :

- les parties s'étaient librement accordées sur chacune des composantes du loyer comportant une partie fixe et une partie variable;
- que les composantes du loyer formaient un tout indivisible;
- les règles fixant la révision de ce loyer binaire étaient purement régies par le contrat et échappaient donc aux modes de révision prévus par le statut des baux commerciaux donc à l'article L 145-9 du code de commerce notamment.

La Cour d'appel précisait même : "qu'enfin il n'est rapporté aucune intention malicieuse imputable aux bailleresses, de telle sorte que le contrat qui fait la loi des parties à laquelle elles ont entendu  se soumettre, ne peut être écarté".

Eric DESLANDES 
Avocat -PARIS




mercredi 27 février 2013

LOCATAIRE ET ACTION EN GARANTIE DECENNALE

L'arrêt du 23 octobre 2012 rendu par la 3ème Chambre de la Cour de cassation (N° 11-18.850) rappelle que l'action en garantie décennale contre les constructeurs ne bénéficie qu'au propriétaire de l'ouvrage et non au locataire qui ne dispose qu'un droit de jouissance, puisque ladite action reste attachée à la propriété de l'ouvrage selon la loi.

Ceci étant si le locataire subit un préjudice d'exploitation, une action en responsabilité contractuelle de droit commun lui est ouverte contre l'entrepreneur qui a réalisé les travaux (Cass. 3ème civ. 1er juillet 2009, n° 08-14.714).

Un autre arrêt me laisse cependant perplexe (Cass. 3ème civ. 12 avril 2012 n° 11-10.380) lorsqu'il décide que le bail commercial peut transférer au locataire la possibilité d'agir en garantie décennale pour les travaux réalisés en cours de bail, dès lors que la clause met à la charge du locataire toutes les obligations de réparation en ces termes :

"le preneur prend la propriété louée dans l'état où elle se trouve actuellement, sans pouvoir prétendre à aucune réparation pendant toute la durée du bail. Il entretiendra, à ses frais, toute la clôture et la maintiendra en bon état, ainsi que les constructions existantes et celles qui pourront exister par la suite. Il aura la charge entière et complète de toutes les réparations quelles qu'elles soient, même le clos et le couvert que la loi met à la charge du propriétaire et dont le preneur déclare dégager entièrement la société bailleresse"


Pour la Cour de cassation en effet, "la cour d'appel a retenu, par une interprétation souveraine, exclusive de dénaturation, que l'ambiguïté des termes du contrat de bail rendait nécessaire, que l'association [la locataire] avait reçu de la congrégation [la bailleresse], par l'obligation ainsi mise à sa charge, un mandat permettant d'y satisfaire et qu'elle était donc recevable à agir contre la société A. [l'assureur de l'entrepreneur] en réparation des désordres de nature décennale affectant les bâtiments dont la conservation lui incombait ;"

Or ce que "je ne comprends pas" c'est que la clause sus-visée est, selon une jurisprudence constante réputée non-écrite en vertu de l'obligation de délivrance.....

Eric DESLANDES
Avocat - PARIS