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mardi 14 novembre 2023

La clause résolutoire définitivement acquise et le caractère inopérant de la mauvaise foi lors de sa mise en oeuvre...

 Cass. 3ème civ., 26 octobre 2023 n° 22-16216 B


C. com. L. 145-41 :" Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu'un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l'article 1343-5 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge."

Dans cette affaire le juge des référés octroie des délais de paiement de 24 mois à un locataire et suspend les effets de la clause résolutoire dans des termes tout à fait classiques. Son ordonnance devient évidemment définitive, le locataire ayant eu gain de cause.

Tout le monde connait les sanctions qui s'attachent au non respect des délais accordés.

Le locataire ne respecte pas les délais, et il lui reste donc un solde locatif à payer. Il est expulsé sur le fondement de ces manquements dans l'exécution des prescriptions de l'ordonnance.

Le locataire attaque l'expulsion et se plaint auprès de la justice qu'au jour de son expulsion il ne devait plus qu'une somme minime au regard de sa dette de départ qui était élevée, et que de plus il avait, à un moment donné, payé plus rapidement que prévu une grande partie de sa dette.

Il en conclut que le bailleur l'a expulsé à tort en faisant jouer la clause résolutoire de mauvaise foi.

La Cour d'appel lui donne raison, mais son arrêt est réformé par la Cour de Cassation.

Au regard de l'article 145-41 du code de commerce il n'y a, si l'ordonnance de référé définitive n'a pas été respectée à la lettre par le locataire, plus de possibilité pour le locataire d'invoquer la mauvaise foi du bailleur. Le bailleur peut exécuter sans crainte ladite ordonnance et procéder à l'expulsion du locataire, devenu occupant sans droit ni titre.

Observations: bien évidemment tout cela sous réserve de la réalité de la non-exécution complète de l'ordonnance. Cette décision ne se comprends que si l'on retient que le locataire avait obtenu ses délais de paiement qu'il avait demandés, sans soulever la mauvaise foi existante lors de la délivrance du commandement. On peut y voir une renonciation à invoquer la mauvaise foi. Le locataire se trouve dans la même position que le bailleur qui, connaissant l'infraction du locataire renouvelle le bail : il ne peut plus invoquer cette infraction. Là le locataire demande des délais en premier lieu, il ne peut plus se prévaloir d'un vice de fond du commandement en ayant implicitement renoncé à l'invoquer, "vice de fond" que constitue la mauvaise foi. On suppose qu'il connaissait ou était sensé connaître les raisons de la mauvaise foi.

Il n'y a donc place pour la mauvaise foi du bailleur en matière de clause résolutoire, qu'avant toute demande de délais et de suspension des effets de la clause résolutoire de la part du locataire.


mercredi 25 octobre 2017

SUSPENSION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE PAR LE JUGE DU FOND POSTERIEUREMENT A UNE DECISION DU JUGE DES REFERES

Cass. 3ème civ 12 mai 2016
n° 15-14.117


Art. L 145-42 du code de commerce : "Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux article 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge."



Dans cette affaire sur fond de liquidation, la cour de cassation rappelle l'absence d'autorité de la chose jugée en référé pouvant affecter les pouvoirs du juge du fond.
Une société locataire débitrice est l'objet d'une ordonnance de référé qui met fin à son bail, sans lui accorder le moindre délai (ce qui s'explique par son absence au procès).
Elle est mise en liquidation quelques mois plus tard et son liquidateur, fort de la détention de la preuve qu'elle s'était mise à jour de ses loyers au moment où le juge des référés avait statué, saisit le juge du fond qui accorde des délais rétroactivement et donc redonne vie au bail (que le liquidateur a certainement pu céder par la suite).
La cour de cassation approuve en cela la cour d'appel en rappelant que la débitrice avait été de bonne foi, n'avait pas déjà obtenu des délais de paiement et que la décision en référé n'avait pas autorité de la chose jugé au principal. 

Ce qui permet au juge du fond d'octroyer des délais rétroactivement et de redonner vie au bail, est les fait que des délais de paiement n'aient pas déjà été accordés.
La prise de connaissance de l'arrêt in extenso permet aussi de faire ressortir le danger dans certains cas, d'une expulsion d'une locataire commerciale, sur la base d'une ordonnance de référé ayant constaté l'acquisition de la clause résolutoire, n'ayant pas l'autorité de la chose jugée au principal. Dans une autre partie de l'arrêt non commentée ici, la cour d'appel a ordonné une expertise pour déterminer le montant du préjudice subi par la locataire qui du fait de l'expulsion a perdu son bail et partant son fonds de commerce. Elle a été suivie par la cour de cassation.