mardi 30 avril 2019

Bailleurs, exprimez-vous ! Après une demande de renouvellement votre silence peut vous mener....très loin....

Cass. 3è. civ., 1er février 2018,  n° 16-29.054 FS-D, 
Sté la Panetière Pyrénéenne c/ Sté rue du 8 Mai



Textes appliqués

L. 145-10 du code de commerce modifié par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 art. 207 :

"A défaut de congé, le locataire qui veut obtenir le renouvellement de son bail doit en faire la demande soit dans les six mois qui précèdent l'expiration du bail, soit, le cas échéant, à tout moment au cours de sa prolongation.
La demande en renouvellement doit être notifiée au bailleur par acte extrajudiciaire ou par lettre recommandée avec demande d'avis de réception . Sauf stipulations ou notifications contraires de la part de celui-ci, elle peut, aussi bien qu'à lui-même, lui être valablement adressée en la personne du gérant, lequel est réputé avoir qualité pour la recevoir. S'il y a plusieurs propriétaires, la demande adressée à l'un d'eux vaut, sauf stipulations ou notifications contraires, à l'égard de tous.
Elle doit, à peine de nullité, reproduire les termes de l'alinéa ci-dessous.
Dans les trois mois de la notification de la demande en renouvellement, le bailleur doit, par acte extrajudiciaire, faire connaître au demandeur s'il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. A défaut d'avoir fait connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent.
L'acte extrajudiciaire notifiant le refus de renouvellement doit, à peine de nullité, indiquer que le locataire qui entend, soit contester le refus de renouvellement, soit demander le paiement d'une indemnité d'éviction, doit saisir le tribunal avant l'expiration d'un délai de deux ans à compter de la date à laquelle est signifié le refus de renouvellement."

+  l'article 1184 anc. du code civil devenu l'article 1224, concernant la résolution judiciaire.

Dans cette affaire la locataire forme une demande renouvellement de son bail. La bailleresse n'y répond pas et trois mois s'écoulent. Cependant, avant que les trois mois ne s'écoulent, la bailleresse aura envoyé à sa locataire un commandement d'avoir à faire cesser des travaux, considérant qu'ils l'étaient en infraction avec le contenu du bail. Postérieurement aux trois mois, deux autres commandements sont délivrés et la locataire saisit la justice pour voir prononcer la nullité du dernier commandement et reconventionnellement, la bailleresse sollicite la résiliation du bail.

Pour la Cour d'appel, le bail doit être résilié, peu important le silence de la bailleresse durant trois mois à propos du renouvellement, les manquements n'ayant pas été acceptés pour autant par ladite bailleresse (travaux réalisés sans autorisation de cette dernière).

La Cour de cassation, sévère avec la bailleresse, estime quant à Elle, que les manquements ayant été connus AVANT l'expiration du délai de trois mois, donc antérieurement au renouvellement, SANS QUE la bailleresse ne s'oppose au renouvellement comme l'y invitait l'article L.145.10 du code de commerce, le bail s'en est trouvé renouvelé...

L'alinéa 3 de cet article est clair :

"Dans les trois mois de la notification de la demande en renouvellement, le bailleur doit, par acte extrajudiciaire, faire connaître au demandeur s'il refuse le renouvellement en précisant les motifs de ce refus. A défaut d'avoir fait connaître ses intentions dans ce délai, le bailleur est réputé avoir accepté le principe du renouvellement du bail précédent."

Sévérité ? Après tout, non. La gravité de la faute pour légitimer un refus est un critère important (cf. L.145-17 du code de commerce, art. 1184 du code civil...). C'est pourquoi, le refus explicite du bailleur - susceptible d'être contrôlée par les tribunaux- est fondamental et il ne peut se contenter d'envoyer un commandement non conforme à l'article L 147-17 du code de commerce en ne formulant avant l'expiration du délai de trois mois aucun risque de refus de renouvellement. Quand le statut donne un mode d'emploi, il vaut mieux le connaître et le suivre.

samedi 27 avril 2019

Quand il vaut mieux ne pas revenir sur son engagement..."De longs procès pour pas grand'chose..."

Cass. 3ème civ, 19 octobre 2017
n° 16- 22665 F-D


Texte : 1134 anc. du code civil (1103 + 1193 du même code)


Dans cette affaire, l'illustration est à nouveau faite, que "la signature engage" et que notamment, les parties peuvent décider dans le contrat de la méthode de fixation du loyer lors du renouvellement du bail.

En l'espèce, les parties au contrat y insèrent une clause aux termes de laquelle lors du renouvellement, le nouveau loyer serait fixé à la valeur locative par un expert, qu'elle désigneraient d'un commun accord.

Pourquoi pas, qui parmi les justiciables, peut regretter de vouloir éviter un long procès ?

La bailleresse délivre donc un congé (en l’occurrence à la sous-locataire) et offre le renouvellement et un nouveau loyer.

La sous-locataire n'étant pas d'accord avec le montant proposé, conformément au contrat, un expert est désigné amiablement, qui  dans son rapport double quasiment la valeur locative du loyer "voulu" lors du renouvellement par la bailleresse.

Puis, chacune des parties refait de son côté appel à son expert et les valeurs déterminées par chacun (y compris par l'expert judiciaire désigné par un tribunal) sont effectivement très différentes les une des autres... pour ceux qui ont raison d'être curieux toutes les valeurs avancées vont de 11 000 € en passant par, 31 000, 35 200 et 49 500 pour arriver à 90 000... 

Le tribunal retient donc une valeur locative de 35 200 € et la Cour d'appel également. Pour les Conseillers de la Cour d'appel, l'expert amiable désigné par les parties a commis une erreur grossière dans l'appréciation de la valeur locative qui est démontrée par la très grande disparité des valeurs déterminées par les différents experts intervenus.

La Cour suprême ne l'entend pas de cette oreille et réplique non sans une logique implacable : la disparité des valeurs présentées ne démontre pas en elle-même la commission d'une erreur grossière de l'expert désigné par les parties "permettant au juge de ne pas respecter les conclusions du rapport établi par l'expert choisi et désigné par les parties, pour évaluer la valeur locative de marché à laquelle [les dites parties] ont convenu de fixer le loyer du bail renouvelé". Dès lors l'arrêt soumis au pourvoi est cassé au visas de l'article 1134 du code civil.

En l'espèce, je pense donc que seul le processus élaboré par les parties est mécaniquement incontournable par l'effet de la force obligatoire des contrats et que la saisine du juge des loyers sans la saisine préalable d'un expert amiable conformément à la clause acceptée par les deux parties, aurait entraîné l'irrecevabilité de la demande, à l'instar des clauses de recours amiable préalable.

Quant à s'en tenir aux chiffres de l'expert amiable, c'est une autre histoire, puisqu'une "erreur grossière" semble selon la Cour de cassation, posséder seule le pouvoir de remettre en cause le rapport amiable désiré par les deux parties. 

Finalement, est-ce que la meilleure des clauses ne serait pas de décider au contrat de s'en remettre à un expert judiciaire désigné par le juge des référés, une fois le renouvellement proposé et accepté, au lieu de s'en remettre à un expert amiable ? En effet ce qui compte c'est de décider amiablement de la méthode la meilleure pour donner une chance de plus à un long procès d'être évité, même si paradoxalement, pour éviter un long procès, il faut tout de même passer par le juge.

L'expert judiciaire a un coût sans doute un peu plus cher, mais la qualité de ses investigations, dans le cadre du respect scrupuleux du contradictoire, et ses qualités de juriste, permettraient  d'éviter des évaluations fantaisistes.

Aller jusque devant la Cour de cassation pour obtenir une telle solution, évidente....la réforme de l'accès à la Cour et de la procédure devant les juges du fond....sera la bienvenue !


mardi 5 février 2019

Les deux mois lumineux : février et mars

Bonjour membres de ce blog, Bonjour vous qui êtes confrontés à des problèmes avec votre bail commercial et plus particulièrement avec un locataire, Bonjour Mesdames et Messieurs les huissiers de justice, Mes chers Maîtres,

Voici une nouvelle proposition intéressante, parce qu'aujourd'hui vous recherchez la compétence à bas coût.

J'aime les contrats où chaque partie y trouve son compte.

Vous êtes un particulier ou un institutionnel, et vous devez procéder à l'expulsion de votre locataire commercial, qui n'honore plus ses loyers et qui se situe à Paris, ou dans le 92, 93 ou 94.

Au delà de ces départements, mais toujours dans le ressort de la Cour d'appel de Paris, il conviendra de prévoir la prise en charge de mes déplacements s'ils nécessitent un billet de train et un minimum de 3 dossiers pour une audience, ces dossiers provenant de vous, sauf audience de renvoi.

Je vous propose la chose suivante : pour 400 € HT c'est à dire 480 € TTC (sans les frais d'huissier et sans les frais d'infogreffe auprès de qui je commande l'état des privilèges et nantissement avant et après l'assignation ainsi que le KBIS)  je diligente la procédure devant le juge des référés du TGI, en acquisition de la clause résolutoire.

Indépendamment du recouvrement de la créance, que je ne peux garantir, si le juge nous accorde un article 700 inférieur ou égal à 480 €, je ne touche par à l'article 700.


Si le juge vous alloue un article 700 supérieur à 480 € je vous réclame la partie supérieure à 480 € A CONDITION QUE VOUS RECOUVRIEZ L'ARTICLE 700.....ET VOS LOYERS, MEME SI DES DELAIS ONT ETE ACCORDES A VOTRE LOCATAIRE AVEC SUSPENSION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE.

Si un accord peut intervenir, il sera homologué par le juge des référés et si le locataire accepte des payer un article 700 supérieur à 480 €, même avec des délais, là encore le supplément obtenu par rapport à ce que vous avez payé me sera destiné.

Votre obligation préalable : avoir fait délivrer les commandement d'huissier visant la clause résolutoire et que ce commandement soit demeuré infructueux durant un mois.

LES 480 EUROS SONT PAYABLES D'AVANCE APRÈS PRÉSENTATION DE MA FACTURE.

Le supplément éventuel sera payé sur les sommes qui transiteront OBLIGATOIREMENT, par mon compte CARPA et vous devrez me signer une autorisation de prélèvement de mes honoraires qui seront considérés comme TTC.

Les frais d'infogreffe augmentés de la TVA sont payables par retour.

La procédure ne débutera qu'avec, également, le paiement préalable de l'huissier de justice, que vous pourrez désigner vous-même.

La procédure ne débutera par la délivrance de l'assignation que si ces trois paiements ont lieu.



Si vous le souhaitez, sous votre contrôle, des négociations en vue d'une transaction sont possibles après la délivrance de l'assignation. Si elles sont à notre initiative on fait un proposition et une contre-proposition si le locataire en formule une qui ne nous convient pas et c'est tout, vous renoncez à m'obliger à écrire une troisième fois. Si elles sont à l'initiative du locataire, vous acceptez que nous formulions deux propositions au maximum là encore.

J'attends vos questions éventuelles sur cette proposition à deslandesavocat@orange.fr

Cette proposition n'est valable que jusqu'au dernier jour inclus du mois de mars.

Bonne journée.
Votre bien dévoué.
Eric DESLANDES


lundi 24 septembre 2018

Le sort du bail renouvelé après la délivrance du commandement de saisie immobilière


Cass. 3ème civ. 7 septembre 2017
n° 16-17174


Pour mémoire on rappellera les dispositions de l’article 2199 du code civil applicables depuis le 1er janvier 2007 : « Les baux consentis par le débiteur après la saisie sont, quelle que soit leur durée, inopposables au créancier poursuivant comme à l’acquéreur.

La preuve de l’antériorité du bail peut être faite par tout moyen."



Cependant le présent litige porte sur l’ancien article 698 du code de procédure civile, applicable aux saisies diligentées avant la réforme et aux termes de ces dispositions :



« Les baux qui n'ont pas acquis date certaine avant le commandement peuvent être annulés et ceux postérieurs au commandement doivent l'être si, dans l'un ou l'autre cas, les créanciers ou l'adjudicataire le demandent. »

Dans cette affaire étaient posées deux questions :



1°) Un adjudicataire des murs commerciaux, doit-il avoir été informé de la demande de renouvellement formée par le locataire après la délivrance au bailleur du commandement de saisie-immobilière, pour que la prescription de son action en annulation du bail et de la demande en renouvellement, puisse lui être opposée ?



2°) Un adjudicataire peut-il prétendre que la demande de renouvellement a pu, suite à l’absence de contestation du bailleur durant trois mois, former un nouveau bail postérieurement au commandement expropriatif, de telle sorte que l’adjudicataire peut obtenir l’annulation de ce bail nouvellement formé ?



A la première question la Cour suprême, répond par la négative et casse l’arrêt de la Cour d’appel sur ce point.
La prescription biennale a eu pour point de départ la date d’effet de la demande de renouvellement et point n’était besoin que cette demande ait été portée à la connaissance de l’adjudicataire… 

Il convient également de préciser que la demande en renouvellement avait été effectuée postérieurement à la date de délivrance du commandement expropriatif.


Cette question était légitime car l’on sait que la prescription ne court que le jour ou le titulaire du droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.


Ceci étant pour la Cour de cassation, le locataire doit bénéficier du statut à partir du moment, où, il a, même entre les mains du bailleur qui a fait l’objet du commandement, adressé sa demande de renouvellement, de sorte que la prescription biennale a commencé à courir à compter de la date d’effet de la demande de renouvellement.


En l’espèce les demandes de l’adjudicataire furent donc déclarées prescrites et l’arrêt de la Cour d’appel, cassé.

A la seconde question la Cour de cassation, à l’instar de la Cour d’appel, a répondu par la négative.
Le bailleur ne pourra pas solliciter l’annulation du bail, car, selon la Cour de cassation, « la demande de renouvellement de bail commercial n’entre pas dans les prévisions de l’article 698 de l’ancien code de procédure civile. »
Le bail renouvelé n’est donc pas assimilé au bail d’origine, ce que l’on peut comprendre, parce qu’il va suivre, au travers de la fixation de son prix une trajectoire qui découle de ce bail d’origine, sans hiatus. Il n'est pas le bail conclu.

dimanche 23 septembre 2018

Le point de départ de l'action en rétractation de l'offre de renouvellement

3ème civ. 9 novembre 2017 
n° 16-23.120


L145-60 du code de commerce : "Toutes les actions exercées en vertu du présent chapitre se prescrivent par deux ans."

Dans cette affaire, le 14 février 2008, le bailleur notifie à sa locataire un congé avec offre de renouvellement et de paiement d'une indemnité d'éviction.
Estimant postérieurement à ce congé que sa locataire avait violé la destination contractuelle des lieux, le bailleur, après l'avoir mise en demeure le 4 janvier 2013  d'avoir à faire cesser cette infraction, l'assigna le 19 avril 2013 en validité du refus de renouvellement.

La Cour d'appel confirmant la décision des premiers juges, valide le refus de renouvellement.

Dans son pourvoi, bref et sans réelle motivation, la locataire continue de prétendre que l'action du bailleur était prescrite, la prescription commençant à courir soit, du jour de la date de délivrance du congé, soit du jour où un bailleur normalement diligent aurait dû avoir connaissance de l'infraction.

Sur cette dernière date, la locataire n'apporte aucun élément permettant en l'espèce de la déterminer.

Ceci étant dans cette deuxième branche de son moyen, la locataire commet l'erreur de se prévaloir de sa faute : c'était à elle de solliciter la déspécialisation plénière et elle ne pouvait se taire en obligeant le bailleur à faire des diligences, à l'aveugle, pour "traquer" la faute...alors de plus, que, par principe, chacun est présumé de bonne foi.

C'est normalement et sans surprise que la Cour suprême rejette le pourvoi.

mercredi 25 octobre 2017

SUSPENSION DE LA CLAUSE RESOLUTOIRE PAR LE JUGE DU FOND POSTERIEUREMENT A UNE DECISION DU JUGE DES REFERES

Cass. 3ème civ 12 mai 2016
n° 15-14.117


Art. L 145-42 du code de commerce : "Les juges saisis d'une demande présentée dans les formes et conditions prévues aux article 1244-1 à 1244-3 du code civil peuvent, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n'est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l'autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge."



Dans cette affaire sur fond de liquidation, la cour de cassation rappelle l'absence d'autorité de la chose jugée en référé pouvant affecter les pouvoirs du juge du fond.
Une société locataire débitrice est l'objet d'une ordonnance de référé qui met fin à son bail, sans lui accorder le moindre délai (ce qui s'explique par son absence au procès).
Elle est mise en liquidation quelques mois plus tard et son liquidateur, fort de la détention de la preuve qu'elle s'était mise à jour de ses loyers au moment où le juge des référés avait statué, saisit le juge du fond qui accorde des délais rétroactivement et donc redonne vie au bail (que le liquidateur a certainement pu céder par la suite).
La cour de cassation approuve en cela la cour d'appel en rappelant que la débitrice avait été de bonne foi, n'avait pas déjà obtenu des délais de paiement et que la décision en référé n'avait pas autorité de la chose jugé au principal. 

Ce qui permet au juge du fond d'octroyer des délais rétroactivement et de redonner vie au bail, est les fait que des délais de paiement n'aient pas déjà été accordés.
La prise de connaissance de l'arrêt in extenso permet aussi de faire ressortir le danger dans certains cas, d'une expulsion d'une locataire commerciale, sur la base d'une ordonnance de référé ayant constaté l'acquisition de la clause résolutoire, n'ayant pas l'autorité de la chose jugée au principal. Dans une autre partie de l'arrêt non commentée ici, la cour d'appel a ordonné une expertise pour déterminer le montant du préjudice subi par la locataire qui du fait de l'expulsion a perdu son bail et partant son fonds de commerce. Elle a été suivie par la cour de cassation.