FORMALITE CONTRACTUELLE NON RESPECTEE - INFRACTION AUX
EFFETS IRREVERSIBLES : OUI
COMMANDEMENT
NECESSAIRE AVANT CONGE : NON.
CIV.3, COUR DE CASSATION arrêt N° 892 du 9 juillet 2003
RAPPEL DES TEXTES
Article L
145-31 du Code de Commerce : «sauf stipulation contraire au bail ou accord du
bailleur, toute sous-location totale ou partielle est interdite. En cas de
sous-location autorisée, le propriétaire est appelé à concourir à l'acte. (...)" [attention, reproduction seulement partielle de cette article].
Article L 145-17 : « -I -
Le bailleur peut refuser le renouvellement du bail sans être tenu au paiement
d'aucune indemnité :
1° s'il
justifie d'un motif grave et légitime à l'encontre du locataire sortant.
Toutefois, s'il s'agit soit de l'inexécution d'une obligation, soit de la
cessation sans raison sérieuse et légitime de l'exploitation du fonds, compte
tenu des dispositions de l'article L
145-38, l'infraction commise par le preneur ne peut être invoquée que si elle
s'est poursuivie ou renouvelée plus d'un mois après mise en demeure du bailleur
d'avoir à la faire cesser (...)» [attention,
reproduction partielle de cet article].
Dans cette affaire, un
bail commercial contient au profit du locataire, l'autorisation de sous- louer à condition toutefois de faire participer la bailleresse à
l'acte. Or, le locataire consent une sous-location passant outre cette
formalité.
La bailleresse porte alors une demande de résiliation
du bail en Justice, qui est rejetée (par contre des
dommages-intérêts lui sont accordés payables par les sous-locataires et
correspondant à l'augmentation du loyer qu'elle aurait dû percevoir du fait des
sous- locations).
Or, avant que le Jugement
(devenu définitif par la suite), ne soit prononcé, la bailleresse avait fait
délivrer à son locataire un congé avec reftis de renouvellement sans offre
d'indemnité d'éviction prenant effet à l'expiration du bail. Le locataire
assigna à son tour sa bailleresse pour voir annuler de congé.
Le TRIBUNAL annule le
congé et la COUR d'APPEL de POITIERS confirme la décision. Pour eux le congé
n'est pas valable (et
le bail renouvelé)
car, l'infraction qui a consisté à ne pas appeler la bailleresse à
concourir à l'acte de sous-location aurait dû être précédée du commandement de
l'article L 145-17 du Code du commerce sus-visé, n'étant
pas une infraction « irréparable ».
La COUR de CASSATION casse cet arrêt
en ces termes : « Qu 'en statuant ainsi, alors que l'omission du
preneur d'appeler la bailleresse à concourir à un acte de sous- location ne
pouvant être régularisée, une mise en demeure préalable au congé n 'est pas
nécessaire, la cour d'appel a violé » l'article L 145-31 du Code de commerce.
OBSERVATIONS : de cette
affaire on peut tirer quelques enseignements, qu'il est bon d'avoir à l'esprit
lorsque l'on est bailleur et que l'on entend refuser le renouvellement du bail, et refuser de régler l'indemnité d'éviction pour motif grave et légitime.
1- Un
refus définitif de résiliation du bail, n'exclut pas la présentation d'une demande en validation de congé pour non-renouvellement sans
indemnité d'éviction.
2- L'infraction
aux clauses du bail, lorsqu'elle est irréparable, rend inutile la délivrance du
commandement de l'article L 145-17 sus-visé préalablement à celle du congé
invoquant cette infraction
3-
Le caractère irréparable (la
jurisprudence utilise aussi le terme « irréversible ») de l'infraction doit bien entendu être le
centre du débat judiciaire, puisque de sa qualification dépend la nécessité de délivrer préalablement au non-renouvellement, un congé reproduisant l'article L 145-17 I-1° du code de commerce. En l'état celles retenues
par la jurisprudence
et qui « simplifient » la procédure de non-renouvellement sont les suivantes :
•
inexploitation d'un fonds dans les lieux loués ;
•
cessation de toute activité de manière
irréversible,
•
défaut d'inscription au registre du commerce à
la date de notification du congé ou de la demande de renouvellement,
•
destruction par le preneur d'une partie de
l'objet du bail,
•
infraction délictuelle,
•
cession de bail occulte,
•
les effets eux mêmes irrévocables pour le
preneur d'une décision judiciaire,
•
la fermeture d'un fonds sur décision
administrative.
La
présente décision reprend un jurisprudence qui dans le même cas avait parlé
d'infraction « instantanée » pour justifier l'inutilité du commandement (Cass
3è civ, 2 novembre 1982, N° 80-16.723, Rev. Loyers 1983, p 45). Mais au fait,
l'instantané exclut-il l'irréparable ?